Philippe Duron : ''Le retour de l'écotaxe est une bonne idée''

philippe duron

Philippe Duron a présidé l'AFITF pendant 12 ans.

Crédit photo David Delion
Président de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afitf) pendant 12 ans, Philippe Duron vient de passer le flambeau. Il livre son bilan et revient sur ses choix.

Actu Transport & Logistique : Quel bilan tirez-vous de ces douze années à la présidence de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afitf) ?

Philippe Duron : Ayant atteint la limite d’âge, mon mandat à l’Afitf est tombé avec une certaine froideur statistique le 19 juin. Je reste néanmoins administrateur de l’agence. Pendant 12 ans, j’ai œuvré à faire vivre cette agence qui a toujours été critiquée par la Cour des comptes.

Pendant toutes ces années, nous avions trois missions : assurer des financements réguliers aux projets engagés par l’Etat, garantir la transparence des politiques d’infrastructures menées et veiller à ce que les financements sont affectés aux infrastructures ne soient pas des variables d’ajustement. J’estime qu'aujourd’hui nous avons atteint ces objectifs.
 

A-T & L : L’équation budgétaire de l’agence a toujours été compliquée. Qu’en est-il aujourd’hui ?

P. D. : À l’origine, l’Afitf devait notamment être financée par les taxes d’aménagement du territoire, les redevances domaniales et les dividendes des sociétés d’économie mixte concessionnaire d’autoroute (Semca). Au bout d’un an d’existence, elle a été coupée d’une source de financement qui avait représenté 332 M€ en 2005 suite à la privatisation des autoroutes. Puis le Grenelle de l’Environnement a fait émerger le principe d’une redevance kilométrique applicable aux poids lourds, l’écotaxe, qui devait rapporter à l’agence 800 M€ chaque année.

En parallèle, le Grenelle 1 s’est aussi traduit par le lancement du Schéma national des infrastructures de transport (SNIT) et ses 175 projets, dont ni l’échelle de programmation ni les financements associés n’ont été précisés. Il fallait pourtant trouver 245 Md€ pour les financer. Au final, l’écotaxe n’a jamais vu le jour et nous devons rembourser 50 M€ sur 10 ans à la société Ecomouv, qui était chargée de sa mise en place. Mais, avec la hausse de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) effective depuis 2015, nous avons retrouvé une autonomie financière et ne dépendons plus du budget de l’État.
 

A-T & L : Quel souvenir gardez-vous de la présidence de la commission Mobilité 21 ?

P. D. : Animer les travaux de cette commission pendant six mois a été un véritable challenge. Lorsque Frédéric Cuvillier, alors ministre des Transports, m’a demandé de plancher sur le sujet, je lui ai répondu que faire reposer ce travail sur une seule personne n’avait pas de sens, d’où l’idée de créer une commission pluraliste et mixte. Cela a obligé les techniciens à sortir de leur cadre et les politiques à tenir compte de la réalité économique et financière.

La principale difficulté que nous avons rencontrée a été de trouver la bonne méthode d’évaluation puisque certaines données financières dataient et n’étaient plus pertinentes. Nous avons donc confié au Commissariat général à l’investissement (CGI) et au Conseil général de l'environnement et du développement durable le soin de les rafraîchir. Les résultats de leurs travaux étaient politiquement inacceptables : tous les projets routiers arrivaient en tête. Alors que le Grenelle de l’Environnement mettait l’accent sur le report modal, cela tombait mal… Nous avons alors privilégié une autre approche qui tenait compte des problématiques d’aménagement du territoire, de développement durable et d’utilité sociale.

Au fil de nos analyses nous nous sommes également rendu compte que la modernisation et la régénération du réseau ferroviaire étaient un volet tout aussi important que les "grands" projets. Malheureusement, l'accident de Brétigny-sur-Orge le 12 juillet 2013 l’a parfaitement illustré et a convaincu le Gouvernement d’aller dans ce sens.
 

A-T & L : Quel regard portez-vous sur les premiers pas du Gouvernement en matière de transport et d’infrastructures ?

P. D.Le gouvernement actuel fait une entrée en la matière rapide. La méthode semble intéressante avec la Conférence des territoires, les Assises de la mobilité d’où découlera la loi de programmation début 2018. Un ministre de plein exercice est également une bonne nouvelle.

Enfin, les premières pistes envisagées semblent rationnelles. Une redevance kilométrique pour les poids lourds est assurément une bonne idée puisqu’elle correspond à la mise en œuvre d’une directive européenne dite "Eurovignette" révisée en 2006 et à laquelle il va falloir s’adapter. Certaines régions comme l’Ile-de-France, le Grand Est, la Nouvelle-Aquitaine et PACA, la réclament, mais il faudra veiller à ce qu’il n’y ait pas de disparité dans les dispositifs techniques et qu’il y ait une clé de répartition équitable sur l’ensemble des acteurs.

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