Une « guerre de l’ombre » qui n’éclipse pas la traditionnelle piraterie

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Le rapport 2021 de Dryad Global fait état d’un recul de la piraterie, de plus en plus confinée aux côtes de l’Afrique de l’Ouest, tandis que l’insécurité en mer se fait de nature plus politique, que ce soit dans le golfe d’Aden, aux Philippines ou avec la « guerre de l’ombre » qui oppose Israël et l’Iran.

Il ne s’était étrangement rien passé le long des côtes ouest-africaines depuis trois mois. Un vraquier, identifié comme étant l'Arch Gabriel, enregistré dans les îles Marshall, a été arraisonné dans le Golfe de Guinée le 3 avril.

Le navire et l'équipage sont aujourd'hui considérés comme sains et saufs. Les données AIS du navire indiquent que ce vraquier de 61 300 tpl se trouvait au large de l'Afrique de l'Ouest depuis la mi-mars. Il avait quitté Houston à la mi-février et était probablement en attente de son prochain contrat. Cette longue période d’inactivité en a fait une cible d’opportunité.

Cet incident est l’unique arraisonnement au cours des 30 derniers jours. Le MDAT-GoG, la coopération en matière de surveillance et de rapports entre la Royal Navy britannique et la Marine française dans la région, signale peu d’événements depuis le début de l’année. Fin janvier 2022, des pirates ont tiré sur un ferry en Guinée équatoriale, mais les forces de sécurité à bord ont riposté et ont pu faire fuir les pirates. Un incident s'est également produit fin janvier plus au nord, dans une région située entre le Ghana et la Côte d'Ivoire, où un petit pétrolier a été abordé. 

Vols au mouillage

Dans le rapport annuel qu'ils viennent de publier, les analystes de sécurité de Dryad soulignent la baisse notable (de 56 %) de la piraterie dans le golfe de Guinée en 2021. Un résultat que le consultant britannique spécialisé dans la sécurité maritime n’attribue que très partiellement à l’arsenal déployé par le Nigeria pour lutter contre la piraterie (Deep Blue Project). Dryad rappelle cependant que les principales composantes terrestres qui sous-tendent la piraterie maritime demeurent et que la baisse à long terme du nombre d’actes de pirateries au Nigeria est une bataille au long cours.

Pour le spécialiste de la sécurité maritime « la piraterie devient de plus en plus une menace régionale confinée à l’Afrique de l’Ouest. En Asie du Sud-Est, où la piraterie était auparavant plus courante, aucun incident de piraterie n'a été enregistré en 2021. Au-delà de la piraterie, la criminalité maritime, qui implique principalement des vols au mouillage ou au port, est la menace la plus prolifique à laquelle sont confrontés les marins, impliqués dans 76 % des tous les incidents. »

C’est ce type d’incident qui est le plus fréquent dans le sud-est asiatique, avec une augmentation des cas puisqu’on en a recensé 77 en 2021 contre 65 en 2020. Ces vols, qui se concentrent surtout dans les détroits de Singapour et de Malacca, visent en priorité les pièces de rechange des moteurs et présentent généralement pour les marins un niveau de gravité sans commune mesure avec les attaques menées au large de l’Afrique de l’Ouest.

Incidents en lien avec des conflits régionaux

Puisqu’il porte sur l’année 2021, le rapport Dryad ne s’intéresse pas à l’invasion russe en Ukraine et à ses conséquences sur la navigation en mer Noire. Il inclut cependant l’étude des « incidents résultant du débordement d'un conflit régional ou étatique », qui représenteraient 4,5 % de l’ensemble des incidents. La reprise des échanges commerciaux avec la Libye, la poursuite du conflit au Yémen ou encore des tentatives d’enlèvements perpétrées par des groupes terroristes aux Philippines sont détaillées.

Le rapport met aussi en avant la « guerre de l’ombre » que se livrent l’Iran et Israël, chacune de ces nations visant les navires de commerce appartenant à l’autre. « Bien que l'attribution définitive de la responsabilité de ces incidents reste une tâche difficile, il est largement admis que l’Iran a mené cinq attaques contre des navires appartenant à des entités commerciales israéliennes en 2021 et Israël aurait mené deux opérations similaires contre des navires iraniens de premier plan ». Selon l’expert, Israël vise en particulier les navires iraniens qu’il pense impliqués dans la contrebande de carburant à destination de la Syrie.

Environnement de peur

Dryad Global estime cependant que les menaces iraniennes sur les navires de commerce, si elles créent un environnement de peur et d’incertitude, ne font pas augmenter significativement le risque pour les navires. La reprise des discussions sur un éventuel retour aux accords de Vienne sur le nucléaire iranien pourrait faire évoluer les choses, dans un sens qui dépendra de l’option privilégiée par Téhéran : entre la poursuite du dialogue et l’affirmation de sa puissance auprès de ses voisins et de son opinion publique.

Étienne Berrier

 

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