Vous êtes conducteur d'autocar depuis trois ans, comment dans votre quotidien dépassez-vous votre handicap ?
Les employeurs, France Travail et les centres de formation ne savent pas réellement ce que signifie la surdité. C'est là où réside la difficulté à intégrer le monde du travail. Un candidat sourd est obligé d'effectuer une Prestation d'évaluation des capacités fonctionnelles (PECF), qui est une étape supplémentaire pour passer les permis de conduire. C'est long, et cela représente une perte du temps. C'est pour cette raison que nous souhaitons sensibiliser le plus grand nombre par l'intermédiaire de l'association.
Et donc, pouvez-vous nous présenter le travail de l'ARSF ?
Déjà, avant de créer l'association, nous avions constitué une équipe au sein du comité de travail Permis pour tous, auprès de la Fédération nationale des sourds de France.
Nous avons travaillé pendant 4 ans à abroger le texte législatif des affections médicales des permis poids lourd pour les personnes sourdes. Ce texte vieux de cinquante ans n'était plus adapté et discriminant. Nous avons réussi à le faire modifier, en date du 28 mars 2022.
Les personnes sourdes peuvent désormais accéder plus facilement aux permis poids lourd. En France, une trentaine de personnes sourdes conduisent des camions et quatre, des autobus ou autocars.
Quel est votre principal combat aujourd'hui ?
Notre combat reste la sensibilisation des médecins du permis de conduire, agréés par les préfectures, et les formateurs. Nous créons des lexiques, en langue des signes française, pour les poids lourds.
Nous continuons de nous battre pour faire évoluer le texte adopté le 28 mars 2022 car la procédure est encore trop complexe. Beaucoup trop de démarches administratives restent encore à passer avant de se présenter aux permis PL. Nous organisons pour cela des rencontres, en France mais aussi au niveau européen.
Pouvez-vous détailler la contribution de l'association à l'adaptation pour les sourds de la formation aux permis PL ?
L'association travaille à créer et compléter les pictogrammes permettant de traduire les visuels de la formation. Nous collaborons avec la société de l'Ixiade, basée à Grenoble (Isère), pour créer des icônes graphiques. Quand un formateur ou un inspecteur du permis parle, l'écran Pimas (une société qui équipe les auto-écoles) traduit sous forme d'icônes pour que les sourds visualisent les propos.
Ce 9 mars à Roanne, vous organisiez une conférence, quel en était le thème ?
L'Association des sportifs sourds de Roanne m'a proposé cette conférence pour faire connaître l'ARSF et expliquer ses objectifs, comment nous avions réussi à faire évoluer la réglementation.
Nous intervenions pour la cinquième fois à Roanne. Une trentaine de sourds étaient présents. Nous avons donné des informations sur les démarches et nos combats. Deux personnes se sont montrées intéressées par l'opportunité de s'orienter vers un métier de la conduite poids lourd. Les débats furent riches, et nous sommes très contents de ce rendez-vous.
Technique : la PECF, kezako ?
- C'est une prestation sectorielle innovante entre l’Agefiph et l’Aftral
- La PECF répond aux besoins en recrutements du secteur du transport et de la logistique.
- Elle permet la sécurisation du parcours vers l'emploi et dans l’emploi pour les personnes avec un handicap de l’appareil locomoteur.
- Cette prestation permet d’évaluer les conséquences du handicap de la personne sur la formation et l’emploi pour devenir conducteur routier de marchandises, de voyageurs ou de chariot élévateur. Cette prestation permet aussi de régulariser un permis poids lourd, en visant l’autonomie professionnelle dans le droit commun.
Source : https://www.agefiph.fr
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Dans le France Routes n°484-485 de juillet-août 2022, découvrez le portrait de Freddy, conducteur sourd au volant du splendide Daf XF des Déménagements et transports Broyer Frères. Pour vous procurer le magazine dans la boutique en ligne, cliquez sur ce lien.