Cemex poursuit les tests de carburants alternatifs pour « verdir » ses bateaux

Le pousseur Emerillon de Cemex France, après avoir testé le gas to liquid (GTL), va expérimenter du carburant HVO (huile végétale hydrogénée).

Crédit photo Cemex France

Cemex poursuit la transition énergétique de sa flotte fluviale en testant des carburants alternatifs : GTL et HVO. Le groupe a renoncé pour le moment à son projet de pousseur à l’hydrogène, compte tenu des incertitudes réglementaires. Le point avec Jean-Yves Ollivier, directeur de la logistique des granulats de Cemex France.

Sur le bassin de la Seine, Cemex France (filiale du groupe du même nom basé au Mexique) transporte environ 3 millions de tonnes de granulats et déblais par an grâce à sa flotte.

Celle-ci est constituée d’une centaine de barges de 300 à 2500 tonnes et de douze pousseurs dont trois adaptés au poussage sur longue distance de convois de 180 mètres.

L’activité des Chantiers de la Haute-Seine

Situés à Villeneuve-le-Roi, les Chantiers de la Haute-Seine font partie de Cemex France, assurant l’entretien régulier de la flotte fluviale de l’entreprise et réalisant des travaux pour des entreprises tierces.

Deux barges de 600 t sont en cours de construction actuellement. Ce sont les cinquième et sixième d’une série de quatorze barges neuves construites pour le compte de Cemex par les Chantiers de la Haute-Seine, qui n’en avait pas construit pour le groupe depuis plusieurs années.

Ce chantier ne sera finalement pas mobilisé dans un avenir proche pour la construction d’un pousseur électrique alimenté par une pile à combustible à hydrogène, Cemex ayant récemment renoncé à ce projet nommé « PM13 ». L’entreprise avait réalisé toutes les études techniques nécessaires, mais restait l’inconnue de la réglementation applicable à un tel bateau.

C’est d’ailleurs bien la réglementation qui bloque aujourd’hui le bateau Zulu 6 à l’hydrogène du groupe Sogestran.

Pour Jean-Yves Ollivier, directeur de la logistique des granulats de Cemex France :

  • « Nous n’avons pas de visibilité sur le coût de l’hydrogène « vert » ni sur sa disponibilité. Surtout, il pèse une grande incertitude sur la norme d’utilisation de l’hydrogène à bord.
  • Le travail effectué depuis trois ans avec un bureau d’étude n’est toutefois pas perdu, car on ne s’interdit pas de revenir sur le sujet ultérieurement, quand des avancées sur la norme et la disponibilité de l’hydrogène auront été constatées ».

Le GTL n’a pas convaincu

La situation n’est toutefois pas figée pour la transition énergétique de la flotte fluviale de Cemex qui se conjugue donc, pour l’instant, avec des expérimentations de carburants alternatifs.

« Nous sommes en veille sur la question des carburants alternatifs, indique Jean-Yves Ollivier. Face à l’incertitude sur celui le plus adapté à nos bateaux et activités à l’avenir, nous nous tournons vers des carburants de transition facile à mettre en œuvre ».

Le GTL (gas to liquid), carburant pour moteurs diesel synthétisé à partir de méthane, a été le premier carburant de transition alternatif au gazole testé à partir de 2020 à bord de l’Emerillon, pousseur de manœuvre utilisé pour le déplacement des barges dans Paris. « Cela réduit les émissions d’oxydes d’azote, ainsi que le bruit et la fumée : un résultat très bénéfique pour nos équipages », résume Jean-Yves Ollivier. Le Busard, second pousseur parisien de Cemex, est lui aussi passé au GTL en 2021. Mais l’inconvénient avec le GTL est qu’il est issu de gaz fossile, et ne réduit donc pas les émissions de CO2.

Cemex se tourne désormais vers un autre carburant : le HVO ou huile végétale hydrogénée. Depuis septembre 2022, le Busard, qui navigue entre les centrales à béton de l’ouest parisien, utilise du HVO fourni par Total. L’Emerillon devrait suivre dans les mois à venir.

Un surcoût non négligeable

« L’avantage de ces carburants, c’est qu’il n’y a aucune modification à apporter aux moteurs, précise Jean-Yves Ollivier. Nous avons eu l’assurance de Total que ce HVO ne provenait pas d’huile de palme, mais d’huiles recyclées. Cela nous permet de réduire nos émissions de CO2, ce que le GTL ne faisait pas. Dans le cadre de Fret 21, Cemex s’est engagé à réduire de 12 % ses émissions fin 2023, par rapport à 2020 ».

La démarche de passage au HVO est pour l’instant limitée au Busard, avec 40 000 litres prévus en 2023. Ce passage au HVO sera poursuivi sur les autres pousseurs de manœuvre. Les pousseurs de ligne viendront plus tard car leur consommation importante est un frein, le HVO coûtant 300 euros de plus aux 1000 litres que le gazole non routier (GNR). La consommation totale de l’ensemble de la flotte Cemex est de l’ordre du million de litres de GNR.

La problématique du soutage

Outre le surcoût, le passage au HVO soulève aussi la question du soutage : ce produit est livré par camion, ce qui rend l’approvisionnement plus facile pour les « petites » unités, les pousseurs de ligne privilégiant le recours à un bateau avitailleur, comme c’est le cas pour le GNR. Il n’est d’ailleurs pas sûr que le HVO soit disponible en quantité suffisante pour toute la flotte.

Pour réduire encore son bilan carbone, Cemex s’intéresse aussi à celui de ses sous-traitants. Par exemple, en transport routier, avec certains transporteurs utilisant de l’Oléo 100. Ou encore en fluvial, où tous les automoteurs des artisans avec lesquels le groupe est en contrat utilisent du GNR. Une réflexion est engagée à ce sujet, pour les amener à effectuer leur propre transition énergétique.

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