« La collaboration avec l’Union européenne est un aspect essentiel de notre stratégie »

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Le secrétaire général de la Commission centrale pour la navigation du Rhin (CCNR), Bruno Georges, présente la situation des trafics sur le Rhin et les priorités de cette organisation. NPI : quel est l'état du trafic fluvial sur le Rhin et quelles sont les perspectives ? Bruno Georges : En 2017, le transport fluvial de marchandises sur le Rhin a atteint 186 Mt, un niveau équivalent à 2016. Les affluents du Rhin ont connu quant à eux un trafic en hausse de 13 % pour la Moselle et de 4 % pour le Main. La tendance pour 2018 est à la croissance des trafics sur le Rhin pour plusieurs catégories de produits, due surtout à une bonne hydraulicité, qui constitue toujours un facteur très important pour la navigation rhénane. La tendance continue à être positive pour les conteneurs sur le Rhin, malgré les problèmes de congestion dans les terminaux à conteneurs des ports maritimes. Le trafic de conteneurs sur le Rhin a bénéficié en 2017 d’une interruption importante du trafic ferroviaire sur l’axe rhénan qui a favorisée un transfert modal du rail vers le fleuve, qui plus est – semble-t-il – de manière durable. En ce qui concerne les vracs liquides, les transports de produits chimiques ont, eux aussi, augmenté et continuent à croître sur le Rhin, tandis que la tendance est négative pour les produits pétroliers, suite en particulier à la diminution d’utilisation du fuel pour le chauffage domestique. Dans le domaine des vracs secs, la tendance est négative pour le transport de charbon, en raison des changements structurels enregistrés dans le secteur énergétique, l’Allemagne en particulier évoluant vers l’abandon du charbon. L’essor des trafics de charbon lié à la fermeture des centrales nucléaires n’était que transitoire, la forte diminution depuis 2010 des transports de charbon sur le Rhin se confirmant. Les importations de charbon ont longtemps constitué un bon indicateur de l’état de la navigation sur le Rhin : ce n’est plus le cas ! Ce sont aujourd’hui les conteneurs qui jouent le rôle de stabilisateur de trafic avec une croissance plus ou moins forte d’une année sur l’autre, mais toujours présente. Les produits agricoles connaissent une certaine stagnation, mais leur importance dans la navigation rhénane reste bien moindre que sur la Seine, la Moselle ou le Danube. Les transports de minerai de fer connaissent aussi une stagnation, même si l’industrie sidérurgique a toujours un grand rôle dans le bassin rhénan avec les régions de la Sarre et de la Ruhr. Les matériaux de construction suivent, quant à eux, une tendance légèrement positive, avec l’augmentation démographique dans les grands centres urbains. NPI : quelles sont les coopérations de la CCNR avec d'autres organismes internationaux ? Bruno Georges : La stratégie adoptée en décembre 2017 par la CCNR réaffirme tout l’attachement des États membres à l’activité traditionnelle de notre organisation. Ladite stratégie confirme par ailleurs toute l’importance de pistes de travail comme le développement de l’innovation et de la recherche et les réponses au changement climatique, et au respect de l’environnement, toujours en coopération étroite avec les principaux organismes professionnels représentant les différents acteurs du transport fluvial, la CCNR entretenant aujourd’hui des relations suivies avec pas moins de 19 organisations agréées. Elle nous encourage également à renforcer toujours davantage nos coopérations de longue date avec les autres organisations internationales actives en matière de navigation intérieure, comme la CEE-ONU, les Commission du Danube, de la Moselle, de la Save et, surtout, l’Union européenne, avec laquelle la CCNR développe depuis plusieurs années un partenariat très étroit. NPI : quels domaines sont concernés par la collaboration entre la CCNR et l’Union européenne (UE) ?

Bruno Georges : L’intensification de notre coopération avec l’UE devait franchir un nouveau cap essentiel en 2015 avec la création du Comité européen pour l’élaboration de standards dans le domaine de la navigation intérieure (Cesni), soutenu activement par la Commission européenne. Réuni le plus souvent à Strasbourg, avec l’appui du secrétariat de la CCNR, le Cesni opère sur la base d’orientations stratégiques définies par la Direction générale de la mobilité et des transports de la Commission européenne (DG Move) et le secrétariat de la CCNR, en plein accord avec les cinq États membres. Le Cesni, qui compte différents groupes de travail, a pour tâche de négocier et d’adopter des normes en matière de prescriptions techniques pour les bateaux et de qualifications professionnelles pour les équipages, normes auxquels les différentes réglementations européennes et internationales (en particulier UE et CCNR) peuvent ensuite se référer, en vue de leur application. Il est prévu pour les toutes prochaines années que le Cesni porte également son champ d’application à une autre matière-clé pour la navigation intérieure européenne, celle des technologies de l’information, avec un intérêt particulier, mais non exclusif, pour les services d’information fluviale (SIF). Réunissant en théorie les 28 États membres de l’UE et les 5 États membres de la CCNR, le Cesni tient deux à trois réunions par an, entrecoupées de nombreuses réunions de ses différents groupes de travail. Sa prochaine réunion du 8 novembre 2018 à Prague, sur l’invitation des autorités tchèques, devrait voir l’adoption de la troisième version du standard européen établissant les prescriptions techniques pour les bateaux de navigation intérieure (ES-TRIN 2019), de même que l’adoption de 14 normes de compétence pour les différentes fonctions à bord des bateaux, pour les examens pratiques et les simulateurs utilisés, ainsi qu’en matière d’aptitudes médicales, avec l’objectif de rendre les professions de la batellerie plus attractives et plus en phase avec les réalités contemporaines.

NPI : les rapports sur le marché que vous publiez font aussi partie de votre partenariat avec l’Union européenne ?

Bruno Georges : Nos rapports trimestriels « Aperçu du marché » et annuels « Observation du marché » sont établis en partenariat étroit avec la Commission européenne, ne se limitant pas au Rhin mais s’intéressant aussi aux chiffres de trafic du Danube et autres voies d’eau intérieures européennes significatives pour le transport fluvial. Pour cela, nous entretenons des collaborations étroites avec plusieurs autres commissions fluviales, dont celles du Danube et de la Moselle, ainsi que des contacts réguliers avec Eurostat et les différents instituts nationaux de statistiques. De la même façon que nous avons fait, par le passé, des prévisions concernant les conteneurs ou le minerai de fer, le rapport de l’Observation du marché 2018, à paraître en septembre, comportera un modèle facilitant la prévision de trafic de produits agricoles en France, où les céréales jouent toujours un grand rôle dans le transport fluvial. Dans le cadre de l’intensification de nos échanges avec la Commission européenne, il n’est pas impossible que nous publiions chaque année, à l’avenir, un rapport supplémentaire sur une thématique particulière. Un premier rapport pourrait ainsi être publié dès l’automne 2018 sur le thème de la multimodalité dans le secteur portuaire. En 2019, un autre rapport thématique pourrait porter sur le financement du transport fluvial et être précédé d’une réunion préalable sur ce même sujet.

NPI : de quelle façon votre collaboration avec la Commission européenne va-t-elle évoluer ?

Bruno Georges : Comme souligné ci-avant, la collaboration avec l’UE est un aspect essentiel de notre stratégie. Or, une étape importante de cette collaboration arrive à échéance fin 2018. Une de nos priorités actuelles est donc d’assurer la poursuite dans les meilleures conditions de la mise en œuvre de notre programme de collaboration avec la Commission européenne pour la période 2016-2018, tout en préparant, dans le même temps, le terrain pour un nouvel accord de collaboration appelé à entrer en vigueur au début de l’année 2019. La conclusion d’un tel accord pour une nouvelle période de trois ans, dans l’attente d’une collaboration plus longue après 2021, passera par des propositions concrètes que nous soumettrons très prochainement à la Commission européenne, avec pour objectif la signature de l’accord recherché fin 2018 pour une transition parfaite entre les deux programmes. Le nouveau programme de collaboration pour 2019-2021 devrait bénéficier du même soutien de la Commission européenne que pour le programme actuel, et ce au titre du Mécanisme pour l’interconnexion en Europe, partie du cadre financier pluriannuel de l’UE 2013-2020. Nous espérons que le prochain cadre financier pluriannuel 2021-2027, présenté par la Commission européenne le 2 juin 2018, permettra de consolider le partenariat actuel et d’assurer un financement du Cesni sur une durée de sept ans, pour aller plus loin encore sur des sujets tels que les prescriptions techniques pour les bateaux, les qualifications professionnelles ou encore les technologies de l’information, sans oublier d’autres sujets et matières appelés à soutenir le développement de la navigation intérieure européenne.

NPI : que prévoyez-vous pour célébrer les 150 ans de la convention de Mannheim ?

Bruno Georges : La CCNR tiendra un congrès commémoratif à Mannheim le 17 octobre 2018, le jour même du 150e anniversaire de la signature de la « convention révisée pour la navigation du Rhin » en 1868. L’anniversaire sera l’occasion de poser un regard à la fois critique et constructif sur ce que cette convention a apporté et sur le rôle qu’elle continuera à jouer à l’avenir. Le congrès débouchera sur une déclaration ministérielle des États membres de la CCNR, en présence notamment de la commissaire européenne aux Transports, Violeta Bulc. Pour marquer l’événement, un exemplaire original de la convention et de ses six instruments de ratification sera exposé pendant un mois au château de Mannheim. Conservés à Strasbourg, comme toutes les archives de la CCNR, aux archives départementales du Bas-Rhin, les documents seront transportés par bateau jusqu’à Mannheim par la brigade fluviale franco-allemande.

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