Panama entre sécheresse et nouveaux travaux pharaoniques

 

L’isthme centraméricain subit une sécheresse qui menace le passage des navires entre océans Atlantique et Pacifique. Le lac Gatún approvisionne difficilement en eau les écluses du canal de Panama. Face à la baisse de son niveau, le nombre des navires en transit ainsi que le chargement ont été réduits et depuis février, une surtaxe leur est appliquée. À plus long terme, le pays cherche des solutions…

Pour la deuxième année consécutive, Panama subit une sécheresse qui menace sa ressource en eau, son canal et le passage des navires entre océans Atlantique et Pacifique. 27 % de précipitations en moins l'an dernier impactent les 3,5 % du transport maritime mondial* qui transite par ses écluses. Au total, ce sont plus de 12 000 navires par an qui prennent ce raccourci entre Asie et Amérique du Nord et qui ont représenté l'an dernier 450 Mt de chargement, pour un apport de 3,3 Md$ au budget panaméen.

Le changement climatique se traduit à Panama par un manque, particulièrement marqué l'an dernier, des pluies tropicales qui caractérisent le pays. Il se manifeste en outre par une augmentation de la température moyenne de 1,5°C sur les dix dernières années, produisant une évaporation plus marquée du lac Gatún, qui fournit en eau le système d'écluses, et une baisse de 2,40 m de son niveau. Ce phénomène impacte l’une des principales ressources économiques du pays à travers les droits de passage qu'il perçoit des navires qui empruntent le canal.

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190 000 m3 d’eau nécessaires à chaque passage 

Pour passer d'un océan à l'autre, les écluses font office de marches d'escalier à monter pour atteindre le lac puis à redescendre pour revenir au niveau de la mer, côté Pacifique ou Atlantique. Entre les deux, de l'eau douce qui permet de remplir les écluses. Pour disposer des volumes d'eau nécessaires, des lacs immenses et artificiels, aménagés lors de la construction du canal, font office de réserve. Le principal, le lac Gatún, est né d'un barrage et recouvre habituellement 430 km2.

Chaque passage de navire dans les écluses les plus anciennes nécessite 190 000 m3 d'eau douce. Et 35 navires en moyenne empruntent chaque jour le canal. Les nouvelles écluses, conçues pour être plus économes, réutilisent une partie de ces volumes mais ont besoin d'un complément de 76 000 m3.

Surtaxe qui peut atteindre 10 000 $

Pour Ricaurte Vasquez, qui a pris ses fonctions en septembre dernier en tant que nouvel administrateur du canal, le changement climatique est clairement une menace et « ses effets nous affectent clairement. » La priorité pour lui est l'élaboration d'un plan pour assurer l'approvisionnement en eau. « Sans eau, il n'y a pas de transit. »

Depuis deux ans, l'Autorité du canal de Panama s’emploie à la préserver. Ainsi l'usine hydroélectrique du lac Gatún, qui fournit de l'électricité notamment à Panama City, a été mise à l'arrêt. Aux navires eux-mêmes, elle a imposé des limites en termes de chargement afin de réduire leur tirant d'eau et le risque d'échouage lors de leur passage. Puis elle a limité le nombre des transits pour l'adapter à sa capacité en eau. Enfin, en janvier dernier, l'Autorité a annoncé l’application à compter de février d’une surtaxe aux navires pour l'eau nécessaire à l'alimentation des écluses lors de leur transit. La surcharge peut atteindre 10 000 $ pour les plus grands navires.

20 % du budget de l'État

À plus long terme, l'Autorité étudie différentes alternatives, comme la construction d'une très coûteuse unité de désalinisation qui permettrait de transformer l'eau de mer en eau douce pour alimenter le lac et le canal. Ou encore des forages dans les eaux souterraines, des barrages supplémentaires pour retenir l'eau, et même des transvasements de rivières. Autant de travaux pharaoniques qui vont nécessiter quelques années avant leur mise en œuvre.

En attendant, l’État panaméen, qui tire de son ouvrage 20 % de ses revenus, est toujours inquiet à l’idée de voir les navires prendre d’autres routes, en particulier celle passant par son historique rival, le canal de Suez qui a cet avantage d'être alimenté par l'eau de mer. La saison des pluies est sur le point de reprendre. Panama espère qu'elles permettront de remplir à nouveau son canal.

Myriam Guillemaud Silenko

*en 2019 alors que la sécheresse avait déjà impacté son trafic. En temps ordinaire, 5 % du trafic mondial transitent par le canal de Panama

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