L'OMI ne décide rien ou si peu

 

Le MEPC74, le comité de protection du milieu marin de l'OMI, qui s'est tenu du 13 au 17 mai à Londres, devait notamment se prononcer sur des mesures de court terme pour réduire les émissions de gaz à effet de serre du transport maritime, tout comme sur le renforcement des exigences en matière d'efficacité énergétique pour les navires existants. Il en ressort des mesures modestes. L'OMI étant l'OMI, la proposition française de réduction de la vitesse obligatoire, sera traitée... avec lenteur. 

Le leader mondial du transport maritime de conteneurs, qui prenait l’engagement en décembre de rendre ses navires zéro carbone d’ici à 2030 en « accélérant les innovations technologiques nécessaires » et qui enjoignait toute la filière à « s'unir » pour développer « le nouveau type de navires » qui navigueront en 2050, se dit aujourd’hui déçu par l’absence de progrès significatifs quant aux solutions de court terme qui devaient être décidées à l'OMI la semaine dernière en matière de réduction des émissions de CO2 mais qui ne l'auront pas été. Confidence du responsable de la stratégie durable de la compagnie. 

D'autres ont été moins policés. « Face aux demandes d'action urgente pour faire face à l'urgence climatique, l'OMI est devenue une parodie de l'OMI avec ceux qui n'ont jamais voulu de l'action pour le climat dans le transport maritime en premier lieu en s'assurant que peu ou pas de progrès aient été réalisés », s'est enflammé John Maggs de Seas At Risk et président de la Clean Shipping Coalition, qui parlait même de « chaises longues réaménagées dont le bruit était assourdissant ». Une subtilité sémantique anglaise...

La session technique du Comité de protection du milieu marin de l'OMI (MEPC74), qui se tenait ces derniers jours, était particulièrement médiatique, car elle avait à l'ordre du jour l'étude de propositions de court terme pour aboutir d’ici à 2030 à un transport maritime purgé de ses émissions de gaz à effet de serre conformément à la stratégie (avec objectifs en termes de réduction) arrêtée par l’organisme international de réglementation du transport maritime (Accord de Paris, Programme 2030 des Nations unies pour le développement durable).

Les mesures à court, moyen et long terme, les scrubbers (l’UE avait déposé, à cet égard, une proposition visant à poursuivre l'examen sur les pollutions induites par l'usage des dispositifs d’épuration des gaz d’échappement) tout comme le renforcement des exigences en matière d'efficacité énergétique pour les navires existants figuraient en effet parmi les points sur lesquels des avancées significatives étaient attendues.

L’OMI reste l’OMI. Son fonctionnement, à 174 membres à avoir voix au chapitre, ne facilite pas la prise de décision rapide. Il avance donc avec lenteur. Et le sort réservé à la proposition défendue par la France, ardemment soutenue par Armateurs de France, et surtout par Philippe-Louis Dreyfus, pour la réduction de vitesse des navires, sera donc traitée avec lenteur. « Compte tenu du grand nombre de propositions, le groupe de travail s'est concentré sur la manière d'examiner, d'organiser et de rationaliser les propositions relatives aux mesures à court terme proposées », indique l’OMI au JMM. Comprendre : d'autres sessions poursuivront l'examen des différentes solutions proposées. En l’occurrence, la prochaine réunion du « groupe de travail intersessions » se tiendra du 11 au 15 novembre prochain et la suivante en mars 2020 (avant le MEPC75, du 30 mars au 3 avril 2020). Bonne nouvelle cependant pour ses promoteurs : elle est à l’étude !

Proposition clivante

Soutenue par la Grèce, et par un certain nombre d’ONG environnementales, la proposition française ne faisait pas pour autant l’unanimité. Loin de là. La Chine, l'Inde, les États-Unis et de nombreux pays d'Amérique du Sud n'étaient guère intéressés par cette initiative, craignant qu’elle ne réduise l'efficacité du transport maritime, augmentant de fait la distance entre les économies et leurs marchés tout en repoussant l'adoption de nouvelles technologies pour réduire le CO2. L’ICS (International chamber of shipping, 80 % du tonnage marchand total) défend elle aussi l'idée que « l'objectif très ambitieux d'une réduction totale de 50 % des émissions de GES d'ici 2050 ne peut être atteint de manière réaliste qu'avec l'introduction de systèmes de propulsion commercialement viables n'émettant pas ou presque pas de CO2, ce qui signifie que les programmes accélérés de recherche et développement doivent être au centre de la stratégie de l'OMI ».

Pour le reste, la session MEPC74 a approuvé des mesures modestes, concernant surtout les navires à venir avec notamment des amendements visant à renforcer les exigences pour qu’ils soient plus économes en énergie (annexe à Marpol). Parmi les amendements, l’OMI a notamment approuvé, en vue d’une adoption à la prochaine session en avril 2020, de renforcer les objectifs de l'indice de conception de l'efficacité énergétique (EEDI, cf.plus bas) couvrant sept types de navires différents (porte-conteneurs, cargos, paquebots, tankers et méthaniers notamment) dont la date d'entrée en vigueur de cette phase 3 a été repoussée de trois ans, à 2025. Une éventuelle phase 4 est en outre à l’étude.  
Il a également été décidé de lancer une quatrième étude sur les émissions mondiales actuelles de GES, la précédente datant de 2014. Elle doit être prête pour le MEPC 76, qui se tiendra à l'automne 2020. Elle est surtout intéressante pour ce qu’elle dira de l’efficacité technique et opérationnelle des mesures prises ces dernières années par l’industrie du transport maritime pour réduire sa consommation de carburant.

Et des tables rondes...

Une résolution (MEPC.323) encourageant la coopération entre les secteurs portuaire et maritime pour réduire les émissions des navires a été par ailleurs adopté. Rien de nouveau dans les suggestions du jour : l'embranchement électrique à quai à partir de sources renouvelables ; le soutage avec des carburants alternatifs à faible et à zéro carbone ; l'optimisation des escales...

En outre, l’OMI a décidé de créer un « fonds financier multi-donateurs volontaire » (Fonds d'affectation spéciale de coopération technique pour la réduction des émissions de gaz à effet de serre) afin de fournir un « appui financier spécifique à des activités de coopération technique », sans autre précision.

Quant aux systèmes d'épuration des gaz d'échappement (EGCS), dispositif plébiscité mais controversé par les compagnies maritimes pour satisfaire aux exigences proches (2020) de la réglementation sur la teneur en soufre des carburants marins, l'impact environnemental de ses rejets d'effluents (objet de la controverse) va faire l’objet d’une étude approfondie, conformément à la demande de l’UE. Le secrétariat de l'OMI prévoit de tenir une autre table ronde avec des représentants de toutes les parties prenantes en juin 2019 afin d'examiner les progrès et de partager l'information.  

Adeline Descamps

 

Indice de conception de l'efficacité énergétique pour les porte-conteneurs

    Pour les 200 000 tpl et plus, le taux de réduction de l'EEDI est fixé à 50 % à partir de 2022.

    Pour les 120 000 tpl et plus mais moins de 200 000 tpl, 45 % à partir de 2022

    Pour les 80 000 tpl et plus mais moins de 120 000 tpl, 40 % à partir de 2022

    Pour les 40 000 tpl et plus mais moins de 80 000 tpl, 35 % à partir de 2022

    Pour les 15 000 tpl et plus mais moins de 40 000 tpl, 30 % à partir de 2022

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