Thibaut San Galli, Nestlé Waters : « Tout devient trop compliqué et trop cher »

 

De guerre lasse. La patience des usagers des ports atteint son seuil limite. Perte de visibilité de la chaîne logistique, conteneurs déroutés hors de France, surcoûts engendrés par le réacheminement par camions vers le port initial…les chargeurs et entreprises de transport routier pensent aussi à déserter les ports français. 

« On se pose la question de fuir les ports français. Certains chargeurs ont basculé depuis la mi-décembre à Barcelone. Cette situation ravive les cicatrices de 2010 où Fos avait fait les frais d’une grève perlée de neuf mois. Nous perdons la crédibilité que nous avions mis tant de temps à reconquérir. La rentabilité n’existe plus puisque le fret est dérouté vers des ports étrangers. Ça devient très grave. Les terminaux sont fermés à cause des dockers et nous sommes dans l’incapacité de récupérer les conteneurs à l’import et à l’export. La perte de visibilité sur notre chaîne logistique nous empêche de prendre des décisions. Dérouter la marchandise coûte extrêmement cher »,  s’alarme Thibaut San Galli, overseas transport manager Marketing & Distribution chez Nestlé Waters et porte-parole des chargeurs au sein de l’Union maritime et fluviale de Marseille-Fos.

Sabotage des locomotives

Perrier, qui avait réussi le tour de force de mettre en place une navette ferroviaire quotidienne entre l’usine d’embouteillage de Vergèze et Fos, a réduit depuis un mois sa fréquence à trois trains par semaines et remet des camions sur les routes. Par ailleurs, la filiale du groupe Nestlé dénonce des actes de sabotage. « Le sabotage des freins des locomotives des tractionnaires met en jeu la sécurité », ajoute Thibaut San Galli, le ton grave.

Maisons du Monde, Perrier, Ikea, Michelin, Batimex et bien d’autres avaient cru au retour de la fiabilité après la réforme des ports de 2010 où à l’époque 10 000 conteneurs destinés à Fos étaient en souffrance dans les ports de Méditerranée.

« Actuellement, la part des conteneurs ayant quitté la France demeure encore marginale mais c’est la désorganisation la plus totale. Les trafics étaient revenus à Fos, les plateformes logistiques s’étaient développées. C’est un suicide. Les conséquences économiques sont dramatiques. Les temps d’attente des conducteurs sur les terminaux ont explosé et les comptes d’exploitation des entreprises sont dans le rouge », dénonce Michel Mattar de TLF Méditerranée.

Rendez-vous prioritaires… payants

Aux termes de 72 heures de grève sur le port, les dockers ont repris le travail samedi 11 janvier au soir en réclamant le paiement des heures de nuit. Pour les transporteurs, c’est la goutte d’eau. Pire encore, pour accéder aux terminaux de Fos où les rendez-vous ne sont plus du tout respectés, un système de rendez-vous prioritaire mais payant serait à l’étude selon les transporteurs désabusés.

Les trafics rouliers sont menacés. « Nos clients dans l’automobile et l’informatique abandonnent le roll pour les conteneurs et passent désormais par les ports du Nord », se désole Marc Grolleau, président de l’Aftri. Fondateur de l’entreprise de transport routier Transcargo, il songe à délocaliser son activité à Barcelone.

Nouvelle grève chez Boluda ?

La nouvelle grève reconductible des remorqueurs de Boluda, annoncée à compter du 15 janvier, risque de faire fuir les compagnies maritimes. Elles sautent à nouveau l’escale de Marseille-Fos au bénéficie de Valence, de Barcelone, d’Anvers et du Pirée avec des conséquences immédiates et très lourdes en terme de coût. Ainsi, faut-il compter 500 dollars de frais pour modification de port de destination et quelque 1 900 € de transport routier entre Valence et Fos.

Dans le secteur du pétrole et de la pétrochimie, la situation est tout aussi dramatique. Les raffineries de Cressier, Feyzin, Pétroineos sont durement impactées. « 200 000 t de brut sont en attente à Fos. Nous nous sommes organisés pour retarder de quatre heures les manœuvres d’accostage et d’appareillage », explique Benoît Fachetti, délégué CGT GPMM chez Fluxel, qui songe à de nouveaux modes d’actions. D’ailleurs, dès le 13 janvier la Fédération nationale des ports et docks devrait faire de nouvelles annonces…

Nathalie Bureau du Colombier

 

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