Et si les routiers étaient à l’origine de la propagation du coronavirus dans les régions du nord de l’Italie, frappées de plein fouet depuis le mois de mars par l’épidémie ? Cette hypothèse est envisagée par un mathématicien italien du CNR (Centre national des recherches), qui a analysé le lien entre la prolifération de cas de contaminations détectées dans certaines provinces du nord et la position géographique des villes frappées de plein fouet par l’épidémie, situées à proximité de certaines artères autoroutières. Bien évidemment, tout ceci déplaît aux transporteurs, qui ripostent.
"L’analyse des données sur le nombre de cas de contaminations détectées dans le nord du pays permet d’envisager que le virus a voyagé sur les autoroutes italiennes, il serait par conséquent intéressant de savoir combien de chauffeurs ont été contaminés et à quel rythme", estime le Professeur Sebastiani dans un article publié sur la revue scientifique en ligne Scienza in Rete.
Analyse de la courbe épidémiologique
Le chercheur, qui s’est appuyé sur des modèles mathématiques, a analysé l’évolution de la courbe épidémiologique entre le 6 et le 25 mars dans un groupe de provinces situées le long de deux voies de communication autoroutières importantes (E35 et E55). L’évolution serait identique, note le Professeur Sebastiani. "Le foyer détecté le 6 mars le long de la côte Adriatique est lié à un autre foyer localisé dans les provinces lombardes également situées le long des tronçons autoroutiers E35 et E55, d’où l’hypothèse que le virus a voyagé à travers les transporteurs", détaille le mathématicien. Dans un deuxième article publié par le quotidien milanais Il Corriere della Sera, le professeur ajoute que sa recherche souligne la distance kilométrique entre les provinces frappées de plein fouet entre le 6 et le 25 mars, mais il remarque qu’elles sont reliées entre elles par les principales artères autoroutières.
L'hypothèse "ne tient pas la route"
Pour les transporteurs, cette hypothèse ne tiendrait pas la route. Ils soulignent les modalités de travail des routiers longue distance “socialement isolés” pendant leurs déplacements car ils dorment seuls dans les cabines des camions garés sur les aires des parking "peu fréquentées la nuit". Ils ajoutent aussi que les routiers n’ont pratiquement aucun contact pendant les opérations de chargement et déchargement des marchandises.
Les transportent soulignent aussi l’importance des mesures adoptées par la clientèle des transporteurs qui ont ultérieurement renforcé l’isolement des chauffeurs selon les termes du dispositif gouvernemental adopté en mars dernier, avec l’introduction du confinement et le ralentissement des activités économiques.
Le débat est ouvert
"Le nombre de routiers qui voyagent sur les longues distances est inférieur au nombre de la population et par conséquent il est peu probable que le transport ait facilité la propagation du virus", affirment également les transporteurs. "Entre le début du mois de février et le début du mois de mars, les probabilités que les chauffeurs aient été contaminés et qu’ils aient contaminé des personnes à leur tour sont élevées, rétorque le Professeur Sebastiani. Il est vrai qu’ils dorment seuls, mais ils mangent dans les restoroutes et entrent en contact avec le personnel chargé des opérations de manutention lorsqu’ils arrivent à destination." Le débat est ouvert.
