Depuis son entrée en vigueur le 1er novembre 2009, le texte de la Convention relative à la collecte, au dépôt et à la réception des déchets survenant en navigation rhénane et intérieure (CDNI) a fait l’objet de plusieurs adaptations afin de prendre en compte les évolutions dans les domaines de la protection de l’environnement et des eaux ainsi que pour améliorer l’applicabilité des dispositions dans la pratique.
Certaines adaptations ont concerné la partie A (déchets huileux et graisseux liés à l’exploitation du bateau) avec, en 2010, l’introduction d’un système de paiement électronique (le SPE-CDNI), système devenu opérationnel depuis le 1er janvier 2011. D’autres ont concerné la partie B (déchets liés à la cargaison) avec en 2012, la dispense pour certains types de transport des obligations relatives à l’attestation de déchargement. En 2013, le format de l’attestation de déchargement a été adapté pour permettre de recourir à deux attestations distinctes, une pour la navigation à cale sèche, l’autre pour la cale citerne.
En 2015, les prescriptions relatives au lavage ont été simplifiées et les responsabilités pour le nettoyage des bateaux ont été clarifiées. En 2016, la notion de « transport compatible », complémentaire à la notion de « transport exclusif » a été prise en compte. Un « transport exclusif » peut être, par exemple, du transport de charbon dans une même cale avec, dans ce cas, des règles de lavage simplifiées entre deux chargements successifs qui s’appliquent car le produit présente des caractéristiques très souvent similaires. Un « transport compatible », peut être, par exemple, du transport de diesel dans une même cale, avec des règles de lavage plus rigoureuses entre deux chargements successifs car le diesel comprend des additifs qui varient d’une compagnie à l’autre. S’il s’agit du même diesel, le lavage n’est pas obligatoire. Il faut préciser qu’un nouveau modèle de l’attestation de déchargement a été introduit en 2017 pour tenir compte de la notion de « transport compatible ». La précédente attestation est utilisable jusqu’au 31 décembre 2018. Les lavages sont pris en charge financièrement par les chargeurs.
La modification la plus complexe pour la partie B a concerné la révision approfondie des standards de déchargement. La nouvelle version est entrée en vigueur le 1er janvier 2018. Pour faciliter l’utilisation de ces standards au quotidien et mettre à dispositions toutes les informations supplémentaires utiles, un outil électronique baptisé « WaSTo » (pour « Waste Standards Tool ») a été développé et mis en ligne sur le site Internet dédié. « Cet outil électronique prescrit précisément et de manière pratique comment traiter les résidus de cargaison après déchargement, expliquent Katrin Moosbrugger et Charline Daloze. Par le biais du moteur de recherche, WaSTo donne immédiatement au batelier l’information dont il a besoin pour savoir s’il doit nettoyer, balayer, aspirer, laver son bateau, selon la matière qui a été transportée. Il rend les prescriptions de la CDNI plus accessibles en numérisant toute cette partie réglementaire de la convention ».
Comme autres outils disponibles sur le site internet de la CDNI, la géolocalisation du réseau des stations de réception des déchets graisseux et huileux (partie A) et des « autres déchets » (partie C). Pour les stations de réception concernant les « déchets liées à la cargaison » (partie B), la géolocalisation n’est pas encore disponible car certaines stations ne sont pas publiques et relèvent largement des ports pour leur mise en place. Des FAQ sont aussi disponibles.
Empêcher le « tourisme des déchets »
Une modification majeure du texte de la CDNI a été adoptée par la CPC en juin 2017 et est actuellement soumise à ratification : il s’agit de l’intégration de dispositions relatives au traitement des résidus gazeux de cargaison liquide produits dans les cales des bateaux. « C’est une évolution de fonds du texte de la CDNI : la protection s’élargit à l’atmosphère et ne concerne plus seulement l’eau, soulignent Katrin Moosbrugger et Charline Daloze. C’est une mesure qui ne peut être mise en place que par une convention internationale : tous les pays ont les mêmes obligations et doivent les respecter, ce qui empêche le « tourisme des déchets ». C’est complexe à mettre en place car il faut des stations de récupération dédiées pour les résidus gazeux et une infrastructure spécifique. Il faut voir comment le marché va réagir à cette nouvelle réglementation contraignante. Des systèmes existent déjà aux Pays-Bas ».
Cette modification de la CDNI pourrait aussi avoir comme conséquence une évolution du marché concernant le transport de matières liquides. Celui pourrait être classé comme « transport compatible » avec une cale qui se spécialiserait et serait dédiée à une matière déterminée. Cela pourrait correspondre à une demande des chargeurs. Cette modification a fait l’objet d’une large consultation publique à l’été 2016, conformément à la convention Aarhus, qui a permis des échanges qui ont réellement conduits à des orientations qui n’avaient pas été prévues dans les discussions initiales, par exemple, l’intégration de certaines matières, rappellent Katrin Moosbrugger et Charline Daloze.
Certaines modifications de la partie B ont été le résultat d’un questionnaire anonyme de 2015 qui a permis d’éclairer les relations entre les bateliers et les installations à terre, notamment concernant la fourniture de documents comme les attestations de déchargement.
Un travail sur le Danube
L’article 17 de la CDNI prévoit la possibilité d’adhésion de tous les États dont les voies de navigation intérieure sont reliées à celles des États contractants. Dans ce cadre, il existe des échanges avec la Commission du Danube. Celle-ci ne dispose pas de pouvoir réglementaire, à la différence de la CCNR, et ne peut émettre que des recommandations. Il apparaît que celles en matière de déchets s’avèrent insuffisantes à lutter contre la pollution de l’eau du Danube ou à contribuer à la protection de l’environnement. Une réflexion est en cours pour mettre en place une réglementation contraignante sur le modèle de la CDNI pour le Danube. Des experts en matière de déchets en navigation intérieure de dix États membres de la Commission du Danube et de la CDNI se sont rencontrés pour la première fois à Vienne le 31 octobre 2018. Afin que la navigation intérieure soit possible en Europe selon des exigences aussi uniformes que possible au-delà des frontières nationales, les deux parties préconisent une harmonisation étendue des dispositions. Les disparités actuelles (flottes, infrastructures disponibles, etc.) ne devraient pas constituer un obstacle. Tous les États membres de la Commission du Danube ne seraient pas obligés d’adhérer à la CDNI même si ce serait l’idéal par rapport à la préservation de l’environnement mais il faut aussi tenir compte de la réalité. « Il y a plusieurs États proches qui sont intéressés, jusqu’à un élargissement, cela prendra encore du temps, relèvent Katrin Moosbrugger et Charline Daloze. L’une des difficultés est que pour certains États adhérer à une convention internationale de plus n’est pas simple car cela implique des obligations notamment sur le plan opérationnel, comme la mise à disposition d’un réseau de stations de réception suffisant ». Mais il faut sans doute aussi raisonner en termes de coûts/bénéfices : l’effet de masse de la mise en place d’une convention internationale comme la CDNI constitue un atout majeur. Enfin, il faut signaler que la France mène une réflexion pour élargir le champ d’application de la CDNI dans les années à venir à d’autres voies navigables que celles actuellement concernées dans le pays.