« Les partenariats, la clé du succès pour devenir un port durable »

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Entretien avec Claudia Mariconda, responsable transition durable au port d’Anvers, qui présente la démarche en matière de transition écologique. L’ambition d’Anvers est de devenir un port « vert », circulaire, numérique et innovant, y parvenir passe par une mobilisation de l’ensemble de la communauté portuaire et au-delà. N.P.I. : Comment le port d’Anvers conçoit-il son rôle dans le domaine de la transition écologique ? Quelles en sont les concrétisations ? Claudia Mariconda : L’avenir du port d’Anvers est une histoire de personnes, d’économie et de climat. Au port d’Anvers, nous travaillons avec l’ensemble de la communauté portuaire, sur la transition vers un port plus durable. En tant qu’autorité portuaire, nous jouons un rôle de pionnier dans la transition énergétique. En collaboration avec l’industrie, nous travaillons à un port neutre en CO2 au travers de projets axés sur les sources d’énergie alternatives (par exemple, le méthanol durable, l’hydrogène vert, l’énergie éolienne).

Pour atteindre l’objectif, l’autorité portuaire a développé un rôle de « bâtisseur communautaire proactif » en plus de ses responsabilités de propriétaire, d’opérateur et de régulateur. Par ce rôle, nous créons de la valeur en soutenant activement de nouveaux modèles commerciaux durables. Nous rassemblons notamment des entreprises, des universitaires, des ONG, des employés, des clients pour travailler ensemble sur des projets afin d’accélérer la transition vers un port « vert », circulaire, numérique et innovant. Nous sommes convaincus que les partenariats sont la clé du succès et que le port est une plateforme d’innovation idéale.

Nous avons cinq priorités : croissance durable, mobilité, transition, sûreté et sécurité, excellence opérationnelle. En trois ans, nous avons atteint 80 % des objectifs fixés. En voici quelques exemples. Comme alternative aux déplacements en voiture, nous avons investi dans un réseau de bus à vélo et de bateau-bus. Avec plus de 100 employés, nous avons rédigé une déclaration de RSE et une politique de développement durable en utilisant les objectifs de l’ONU comme ligne directrice. Nous faisons équipe avec des entreprises pionnières à l’intérieur et à l’extérieur de la plate-forme portuaire et, avec elles, nous avons lancé des projets sur l’hydrogène vert, de captage et d’utilisation ou de stockage de CO2 (CCUS), la chaleur résiduelle, les carburants alternatifs. Nous avons commandé la construction du premier remorqueur à hydrogène au monde.

Actuellement, nous avançons sur un nouveau plan stratégique qui se concentrera encore plus sur la croissance durable et la transition vers un port plus durable. Nous travaillerons, par exemple, sur un plan portuaire de résilience climatique et sur la création d’un véritable hub circulaire, avec des investisseurs qui renforcent notre cluster existant et permettront au port de devenir plus rapidement durable. Notre objectif ultime est de devenir un port climatiquement neutre en 2050.

N.P.I. : Présentez-nous le projet Next Gen District.

C. M. : Nous transformons l’ancien site de General Motors en un lieu destiné à l’économie circulaire. Next Gen District vise à attirer les start-ups et les scale-up dans l’industrie circulaire, la chimie et les énergies renouvelables. C’est l’un des derniers grands sites disponibles dans le port qui, avec à sa situation privilégiée à proximité du plus grand cluster chimique d’Europe, offre diverses opportunités. Le port d’Anvers a délibérément choisi de réserver cette vaste zone à l’économie circulaire, franchissant ainsi une étape supplémentaire dans la transition vers une société durable et neutre pour le climat.

NextGen District sera un site industriel où les « produits en fin de vie » auront une deuxième ou troisième vie, où des solutions circulaires pour le carbone seront recherchées et des expériences menées avec des énergies renouvelables. Nous nous concentrons sur les projets de démonstration industriels à faible émission de carbone, pensons aux biosourcés, aux déchets des produits chimiques, aux carburants, au CCUS, au power-to-molécules. Le site intègre un terrain d’expérimentation où les start-ups ont la possibilité de se développer, des parcelles autonomes de différentes tailles destinées aux acteurs chimiques et industriels.

Afin de créer un site le plus durable et le plus optimal possible, un examen est conduit sur les services et équipements pouvant être organisés collectivement.

N.P.I. : Présentez-nous le projet Antwerp@C.

C. M. : Nous avons réuni sept entreprises de la chimie et de l’énergie fin de 2019 pour étudier la faisabilité technique et économique de la construction d’une infrastructure CO2 dans le port d’Anvers. Avec le projet Antwerp@C, les partenaires visent à maintenir le CO2 hors de l’atmosphère et, à ce titre, à apporter une contribution significative aux objectifs climatiques, grâce à des applications de captage et d’utilisation ou de stockage de CO2 (CCUS), le tout dans un laps de temps relativement court et à des coûts raisonnables.

Le port d’Anvers abrite le plus grand cluster énergétique et chimique intégré d’Europe, ce qui en fait le lieu idéal pour mettre en place de nouveaux projets de collaboration transfrontalière pour une réduction innovante des émissions de CO2. Les sept entreprises (Air Liquide, BASF, Borealis, ExxonMobil, Ineos, Fluxys,Total), étudient la faisabilité de la construction d’infrastructures CO2 dans le port pour soutenir les futurs CCUS. L’objectif est d’avancer sur le captage et le stockage du carbone (CCS) mais aussi sur le captage et l’utilisation du carbone (CCU) c’est-à-dire la réutilisation du CO2 comme matière première pour l’industrie chimique. Ces deux aspects sont considérés comme des voies importantes dans la transition vers un port neutre en carbone. Ce projet transfrontalier innovant peut devenir la première et la plus grande infrastructure d’exportation de CO2 multimodale en libre accès au monde.

En octobre 2020, l’Union européenne a accordé des financements pour réaliser des études pour un terminal d’exportation de CO2 liquide, une conduite dans le port et une canalisation transfrontalière de CO2 avec les Pays-Bas. Avec ce soutien financier, Antwerp@C peut s’engager plus loin. Le consortium est renforcé dans son ambition de réduire les émissions de CO2 au sein du port (18,6 millions de tonnes d’émissions de gaz à effet de serre en 2017) potentiellement de moitié d’ici 2030.

N.P.I. : Qu’en est-il de la récupération de chaleur et de vapeur ?

C. M. : Il existe plusieurs projets où la chaleur et la vapeur qui pourraient être perdues sont captées et réutilisées. Par exemple, il y a le réseau de vapeur Ecluse. La chaleur de six installations de combustion est fournie sous forme de vapeur à six entreprises voisines du secteur chimique et logistique. De cette manière, ils peuvent rendre leur approvisionnement énergétique plus durable. Cela présente des avantages pour l’environnement : chaque année, 100 000 tonnes d’émissions de CO2 sont évitées.

Le port d’Anvers examine avec la ville, Indaver et Fluvius si la chaleur résiduelle des incinérateurs d’Indaver peut être utilisée pour le chauffage durable des ménages, des écoles et des bâtiments publics dans le Nord de l’agglomération.

En 2019, le premier parc de concentrateurs solaires de l’industrie européenne a été inauguré au port d’Anvers. Cette technologie énergétique pionnière génère une chaleur écologique à partir de la lumière solaire concentrée qui peut être utilisée par les entreprises industrielles. La centrale a été installée pour Adpo par la société d’énergie Azteq, basée à Genk, dans le cadre d’un projet-pilote cofinancé par le gouvernement flamand.

L’énergie solaire thermique concentrée (CST) est une technologie innovante dans laquelle la lumière du soleil est concentrée par des miroirs paraboliques et convertie directement en chaleur. Les températures peuvent atteindre 400 °C, fournissant une chaleur de haute qualité qui peut être utilisée dans les processus industriels. La technologie produit trois fois plus d’énergie par mètre carré installé qu’un système photovoltaïque. En outre, la chaleur peut être stockée dans des conteneurs isothermes afin qu’elle soit disponible pour une utilisation de nuit. La technologie est une alternative entièrement écologique pour les besoins de chauffage industriel et peut donc contribuer de manière significative à la réduction des émissions de CO2.

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