Importations agricoles ukrainiennes : Emmanuel Macron rouvre le dossier alors qu'un accord européen a été trouvé

Le président français Emmanuel Macron a exprimé le 23 mars son souhait de "rouvrir" l'accord européen trouvé deux jours plus tôt, renouvelant pour un an de plus l'exemption douanière accordée à l'Ukraine mais un plafonnement des importations pour certains produits agricoles. Des restrictions que Paris juge insuffisantes. D'autant que l'accord comporte des biais.
 

Le ministre de l'Agriculture Marc Fesneau avait exprimé des réserves au micro de France Info quelques heures après l'accord convenu à Bruxelles, estimant le mécanisme incomplet, souhaitant inclure « plus de céréales ». « Le blé français ne peut pas être la variable d'ajustement du soutien à l'économie de l'Ukraine », avait-il signifié.

Alors que l'exception sur les droits de douane de céréales, qui arrive à terme en juin, devait être discutée en vue de sa prolongation pour un an de plus, le conseil et le parlement européens sont convenus la semaine dernière de plafonner certaines importations agricoles ukrainiennes jusqu'alors exemptées de droits de douane, parmi lesquelles les œufs, les volailles, le sucre, l’avoine, le maïs et le miel. Mais le blé et l'orge ne figurent pas sur la liste alors que les eurodéputés le demandaient.

Afin d'aider Kiev, à la suite de l'invasion de son voisin, Bruxelles avait supprimé en 2022 les droits de douane sur plusieurs produits ukrainiens transitant par l'UE. Effet contreproductif. En raison de problèmes logistiques, les exportations ukrainiennes, destinées aux pays tiers, ont inondé les marchés européens (+ 11 % en janvier-septembre 2023 selon Bruxelles).

Acceptabilité érodée

"Il faut trouver un équilibre", a indiqué Emmanuel Macron à l'issue d'un sommet européen à Bruxelles, soulignant que "tout particulièrement ces derniers mois, la production (ukrainienne) a flambé", déstabilisant le marché européen.

"Aujourd'hui, l'Ukraine ne produit pas avec les règles de l'Europe. On lui a donné une facilité liée à la guerre, mais on est en train d'éroder l'acceptabilité de l'Ukraine [dans l'opinion publique européenne] et des producteurs ukrainiens partout sur le marché européen parce que ce n'est pas juste", a-t-il dénoncé.

L'accord doit encore être entériné formellement par les Vingt-Sept comme par les eurodéputés, en commissions puis en séance plénière fin avril, avant l'entrée en vigueur le 6 juin. S'il parvient jusque-là, les importations dédouanées de ces produits seront de facto plafonnées aux niveaux moyens importés par l'UE en 2022 et 2023, niveaux au-delà desquels des droits de douane seront automatiquement réimposés.

Les eurodéputés auraient souhaité que la période de référence soit assise sur la moyenne de trois années (2021-2023), les organisations agricoles critiquant le fait que le plafonnement corresponde aux volumes très élevés des deux dernières années à l'origine de la crise.

Accord détourné

"Notre souhait est qu'on puisse rouvrir dans les prochaines heures le texte, et trouver un accord", a ajouté Emmanuel Macron, qui voudrait inclure le blé tendre dans les mesures de sauvegarde et revoir la période de référence pour les plafonnements en intégrant l'année 2021 (avant la guerre).

"Nous voulons que l'Ukraine et les producteurs ukrainiens puissent continuer à exporter dans un contexte plus difficile". Mais pas quand ce sont des producteurs ou des grands groupes européens qui détourne l'accord "pour aller produire en Ukraine et réimporter avec des règles de production moins-disantes sur notre sol".

La filière céréalière française, troisième exportateur mondial de produits agricoles et agroalimentaires et leader européen de la production et de l’exportation de céréales – a contribué à hauteur de 10 Md€ aux excédents de la balance commerciale du pays en 2023. La Russie et l'Ukraine, bien qu’en guerre et entravées, représentent près de 70 des 212 Mt exportées sur la campagne 2023-24.

"On a des volumes qui ont été multipliés par cinq ou par dix sur certaines catégories" de produits, a encore affirmé le président français.

Adeline Descamps

>>> Lire aussi Céréales européennes sous pression : Bruxelles sort l'arsenal contre les importations ukrainiennes et russes

 

 

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