L'industrie aéronautique mal préparée à un Brexit dur

L'industrie aéronautique, de défense et du spatial en Europe est fortement exposée au Brexit et aux incertitudes qui l'accompagnent, mais, selon une étude, elle n'a pas pris la mesure d'une sortie sans accord du Royaume-Uni de l'Union européenne et y est mal préparée.
"Le risque du Brexit a été très sous-estimé, et un mouvement de panique s'est produit" à l'approche du 29 mars, relève Stéphane Albernhe, managing partner au cabinet Archery Strategy Consulting, déplorant qu'"incertitude et instabilité" règnent. Le 29 mars était la date-butoir pour la sortie du Royaume-Uni de l'UE, mais elle a été reportée au 31 octobre dans l'espoir d'éviter un "hard Brexit", c'est-à-dire une sortie sans accord.
Airbus, fortement implanté au Royaume-Uni, où sont fabriquées les ailes de tous ses avions de ligne, n'a eu de cesse de tirer la sonnette d'alarme face au risque d'un Brexit dur, mais tous les groupes aéronautiques et de défense qui possèdent des sites de production dans le pays sont potentiellement concernés.
Les échanges commerciaux entre le Royaume-Uni et l'Union européenne représentent 700 milliards d'euros, avec sept pays européens qui pèsent 80 % des échanges, dont la France (13 %). "C'est considérable", souligne Stéphane Albernhe. "Le Royaume-Uni est une puissance très forte dans l'aérospatial et la défense", rappelle-t-il. En Europe, "c'est le deuxième pays après la France".
Archery Consulting a réalisé la première étude exhaustive sur le Brexit et les conséquences d'un "no deal" sur le secteur aéronautique, civil et militaire, et spatial, ainsi qu'une enquête auprès de 200 dirigeants de 45 entreprises du secteur en Europe continentale et au Royaume-Uni pour évaluer leur préparation au Brexit.

"Une cartographie des enjeux"

Le cabinet présente une "cartographie des enjeux" et relève l'exposition au risque associée : barrières tarifaires, non tarifaires et réglementaires, libre circulation des personnes et des capitaux, propriété intellectuelle, certification, coopération en matière de recherche et développement (R&D), accès au marché spatial et accords passés entre les États membres de l'UE et les États tiers.
L'impact économique et logistique est, selon l'étude, au centre de leurs préoccupations en dépit des signaux envoyés par le gouvernement britannique concernant les droits de douanes sur les produits importés, dont 80 à 90 % pourraient être supprimés en cas de "no deal". "L'aéronautique civil et le spatial sont les plus exposés", souligne Stéphane Albernhe, avec un volume d'échanges commerciaux de 10 milliards d'euros de l'Union européenne vers le Royaume-Uni et de 13,5 milliards du Royaume-Uni vers les 27. L'industrie de défense représente 560 millions d'euros de l'UE vers le Royaume-Uni et 1,2 milliard dans le sens inverse.
Autre point soulevé par le cabinet : les conséquences du Brexit sur les échanges avec les pays tiers. Après sa sortie de l'UE, le Royaume-Uni tombera sous le régime général de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), avec comme conséquence une remise en cause de l'appartenance du Royaume-Uni au régime accordé par ces traités aux membres de l'UE.
Or, les échanges commerciaux entre le Royaume-Uni et ces pays tiers représentent 134 milliards d'euros, "qui seront fragilisés en cas de 'no deal'".
"L'UE avait négocié 40 accords avec 70 pays tiers, pointe Stéphane Albernhe. Le jour d'après le Brexit, ces accords tombent". Les Britanniques sont donc en train de reconstituer ces accords pays par pays, mais "ça va être un boulot titanesque". Pour l'heure, 10 de ces 40 traités ont été reconduits par des négociations bilatérales (Norvège, Islande, Israël, Suisse, Chili...), représentant 65 % de la valeur totale des échanges commerciaux entre les 70 pays et le Royaume-Uni, note le cabinet. "Néanmoins, des pays majeurs tels que le Japon ou la Turquie posent d'importantes difficultés pour parvenir à un accord".
Autre problème : la certification des pièces d'avion, clé de voûte de la sécurité aérienne. "C'est un sujet anxiogène, qui touche toute la chaîne de valeur. Si la réponse est 'oui, il faut re-certifier', ça va être très compliqué", prévient Stéphane Albernhe.

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