Les opérateurs des modes "alternatifs" défendent leur expertise

L'Institut de formation du port de Marseille-Fos a axé sa première conférence sur les modes non routiers. Les opérateurs y ont défendu des moyens prêts au report modal et déploré le manque d'implication des chargeurs et de leurs clients.
La première conférence semestrielle organisée par l'Institut de formation du port de Marseille-Fos a porté sur les politiques européennes de transports alternatifs à la route. Elle a réuni, devant les étudiants de première et deuxième année, trois professionnels impliqués dans le report modal.
Acteurs du transport fluvial et ferroviaire, les intervenants transporteurs ont souligné la difficulté d'accès aux financements européens et la faible portée de ces derniers.
"Les opérateurs participent au transfert modal mais supportent eux-mêmes les risques, les garanties sont faibles", estime Alain Maliverney, directeur d'agence chez le transporteur combiné fluvial Logirhône. Celui-ci souligne d'une part que les aides sont délivrées au coût de manutention, ce qui induit une subvention a posteriori, sur justificatifs, et d'autre part que les aides ne concernent que les nouveaux services, tous modes dit "alternatifs" confondus.
Fabienne Margail, chef du département hinterland au Grand Port maritime de Marseille-Fos, rappelle que l'Union européenne a redéfini son RTE-T en intégrant la notion de réseaux multimodaux. "L'UE essaie maintenant de donner les moyens du report modal, de recomposer les flux pour donner du trafic aux opérateurs". Cédric Flin, assistant de Dominique Vlasto (PPE) au Parlement européen, souligne pour sa part que "les besoins globaux sont estimés à 500 milliards d'euros, à comparer avec le budget annuel du RTE-T de 29,7 milliards".

Lenteurs administratives

L'accès au financement n'est pas le seul obstacle et le temps administratif n'est pas le temps opérationnel. Pour Alain Maliverney, les lourdeurs sont telles qu'"on cherche des systèmes pour éviter les subventions, on préfère être sur le terrain que monter des dossiers, d'autant que les caisses sont vides". Stéphane Tordjman, directeur d'agence chez l'opérateur ferroviaire Naviland Cargo, va dans ce sens : "Trop de projets ont attendu la subvention pour démarrer, on ne fait plus comme ça". Le représentant de Logirhône attribue cet état de fait aux abus constatés dans le passé, notamment sur les questions environnementales : "On est tombé dans l'excès inverse et cela retarde énormément les dossiers". Il cite en exemple le projet de canal de fond de darse à Fos-sur-Mer, censé relier les terminaux à conteneurs au Rhône et bloqué pour des motifs écologiques.
À en croire Fabienne Margail, la compétence communautaire sur les questions de transport et logistique aurait évolué à l'inverse. "La structure de réseau ferroviaire a été créée avant les corridors multimodaux. Ces derniers s'appuient maintenant sur cette armature existante. D'autre part l'UE agrège les données locales pour apporter des solutions globales. Il y a aussi une coordination internationale des travaux pour assurer la continuité du service et sa cohérence".

Le client final détient la clé

Tous s'accordent en tout cas sur le fait que les transports dits "alternatifs" ont évolué pour proposer de véritables services, bien loin du stade de l'expérimentation. "Nos plans de transport nous permettent d'acheminer la marchandise de manière sûre et rapide, nous ne sommes plus cantonné à la marchandise "non-sensible"", affirme Stéphane Tordjman. Alain Maliverney confirme l'évolution du statut : "Nous avons des moyens. Par exemple, nous sommes capables de charger presque simultanément à l'escale du navire maritime. Nous n'en sommes plus au stade de l'aventure mais à celui de l'industrialisation".
Mais dans les deux cas, les opérateurs déplorent que l'offre existante ne rencontre pas son public. Pour eux, ce sont le chargeur et le client de bout de chaîne qui ont les cartes en mains. "C'est une question de volonté, estime ainsi Alain Maliverney. On aime avoir le choix mais on va souvent au plus simple. Les gens sont contents que nous existions, mais ils demandent toujours plus, notamment plus de fréquences alors qu'ils ne nous confient pas leurs volumes". Celui-ci renchérit à propos de l'offre française : "Nous avons deux régions économiquement fortes, l'Île-de-France et Rhône-Alpes, qui ont des réseaux fluviaux très développés : saturons-les avant d'aller chercher des boîtes à Londres ou à Odessa". Stéphane Tordjman estime, lui, que les ports français - Le Havre, Dunkerque et Marseille – possèdent, grâce à leurs infrastructures, "la capacité de basculer du jour au lendemain leurs trafics vers le rail, ce qui est plus difficile chez nos voisins européens".
Si elles ne vont pas assez vite aux yeux de certains, les choses évoluent quand même. Le responsable de Naviland Cargo témoigne ainsi du fait que "la grande distribution utilise de plus en plus le fer car les enseignes donnent l'instruction aux armateurs de passer une certaine proportion de leurs volumes par le rail. Cette tendance est dictée en grande partie par le client final".
Stéphane Tordjman loue aussi le projet d'Écotaxe, qui est "clairement une incitation faite aux chargeurs d'utiliser les modes alternatifs", et les initiatives locales comme les incitations tarifaires, l'interdiction des camions en ville, etc.
Quant à Alain Maliverney, il ne croit pas que le report modal porte un si grand préjudice au transport routier. "On aura toujours besoin de pré et post-acheminement. Cela réorganise simplement le secteur et permet au transporteur de garder le camion dans sa région, d'où plus de disponibilité et moins de frais". De plus, conclut-il, "les clients du transport combiné, ce sont les routiers, pas les chargeurs".

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