MSC/Til annoncent un investissement de 700 M€ au Havre

Le ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires Christophe Béchu était au Havre ce vendredi 8 juillet pour une visite des nouveaux postes à quai de Port 2000. MSC, via Til, sa filiale portuaire, y a prévu de conséquents investissements. Le leader mondial du transport maritime conteneurisé contrôle deux des trois terminaux havrais depuis qu’il a acquis la totalité des parts à l’un des derniers manutentionnaires indépendants en France.

Pour son premier déplacement au Havre en tant que ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, Christophe Béchu était accueilli ce 8 juillet par Édouard Philippe, dont on le dit « proche », pour une visite des nouveaux postes à quai n° 11 et 12 de Port 2000, en partie financés par Haropa Port, l’État et la Région Normandie, et où l’opérateur portuaire suisse Til, filiale de MSC*, est en train de doubler le nombre de portiques.

L’opération est « tout bénéf’ » sur le plan de la communication politique pour le ministre fraîchement nommé. Sans avoir à décaisser un euro, il devrait récupérer quelques lauriers de la généreuse annonce de Til qui prévoit de conséquents investissements à Port 2000. C’est la concrétisation d’un engagement pris en début d’année par le « groupe étranger le plus francophile » à l’occasion de son acquisition de Terminaux de Normandie. MSC, via sa filiale portuaire Til (70 terminaux de conteneurs dans 27 pays), a racheté à Perrigault, société détenue par la famille havraise Bekaert-Sax, ses deux terminaux : Terminal de Normandie (TNMSC, 1,46 MEVP, postes 3, 4, 5 et 6) et Terminal Porte Ocean (TPO, 550 000 EVP, postes 7 et 8). Plus précisément les parts qu'il ne détenait pas encore. 

Des mouvements capitalistiques

MSC-Til est associé à Terminaux de Normandie depuis 2000, année qui a donné naissance à la société TNMSC, selon un accord de partenariat signé entre Gianluigi Aponte et Jean Bekaert. MSC en a fait son hub au Havre, dans un premier temps établi au Terminal de Bougainville avant son transfert en 2012 sur Port 2000. Til reprendra ensuite, dans les années 2010, les 50 % de parts que détenait APM Terminals (groupe Maersk) dans le TPO aux côtés de Perrigault, devenu l'unique propriétaire en 2006 lors du désengagement de Maersk. Le terminal sera installé sur Port 2000 en 2007.

Désormais, MSC-Til est le seul maître à bord des deux infrastructures actuellement dimensionnées pour recevoir des 20 000 EVP. Il contrôle ainsi deux des trois terminaux de Port 2000, dont la capacité est actuellement de 2,8 MEVP et qui, avec les investissements annoncés, doit être portée à 4,5 MEVP. Le troisième (Terminal de France, TDF) est exploité par Générale de Manutention Portuaire (GMP), dont est actionnaire à 50,2 % Terminal Link (CMA CGM + China Merchants) et Icon Infrastructure, un fonds d'investissement basé à Londres suite à une restructuration récente des participations, qui a vu DP World se retirer.

Les deux concurrents se retrouvent avec six postes d'amarrage chacun, sachant que les deux derniers postes à quai de Port 2000, qui vont allonger de 700 m le linéaire de quai et apporter une capacité additionnelle de 1 MEVP, ont été attribués à GMP. TNMSC-TPO se retrouve ainsi pris en tenaille entre les postes d'amarrage GMP (deux à l'ouest et quatre à l'est).

700 M€ investis

Dans son investissement de 700 M€ d’ici à 2028, Til, qui peut compter sur les volumes de son principal actionnaire MSC, par ailleurs grand acheteur de porte-conteneurs, prévoit des travaux de façon à, entre autres, traiter des porte-conteneurs de 24 000 EVP. Le manutentionnaire installe actuellement des portiques, qui porteront à 20 leur nombre et devrait également tripler la capacité de stockage. Ils seront équipés pour se brancher à l’électricité à quai.  

Les projets devraient générer la création, sur les six années à venir, de 1 100 emplois. Un accord dit « historique » a été signé avec le syndicat des ouvriers dockers. Pour rappel, en reprenant Terminaux de Normandie, l’opérateur suisse a hérité de Dockers de Normandie, la société qui emploie les dockers, Ateliers de Normandie et Portiques de Normandie, les sociétés de maintenance et d’assistance des engins, ainsi que la société de camionnage Roussel.

La montée en capacité du complexe de terminaux TNMSC-TPO devrait renforcer le rôle du Havre en tant que porte d'entrée alternative de MSC en Europe du Nord. L’opérateur de la ligne régulière est actuellement limité par les seules capacités d'Anvers, où Til exploite le plus grand terminal à conteneurs, le MPET, en joint-venture avec PSA.

Appel à l’État français

« Afin de réaliser tout le potentiel du Havre en tant que porte d’entrée pour l’Europe, nous comptons sur le soutien de l’État français en ce qui concerne le développement associé de l’infrastructure du transport ferroviaire intermodal capable d’améliorer encore les liens entre nos terminaux de conteneurs et les chaînes d’approvisionnement européennes », a glissé Ammar Kanaan, le directeur général de Til, qui était accompagné de David Elbez, son directeur des investissements. Philippe Lestrade, directeur général de MSC France, a également été aperçu.

« Le Havre est déjà idéalement positionné sur le plan géographique lui permettant de proposer des infrastructures d’import/export pour tout le continent européen. Le développement de nouvelles liaisons par rail et voie d’eau rehaussera encore l’attractivité du port, boostant les volumes de marchandises que nous comptons traiter sur les décennies à venir. » Adresse clairement intéressée, MSC s’affaire à développer une offre de services multimodaux connectés aux services maritimes. Et il n’est pas sans connaître les déboires du terminal multimodal havrais, censé favoriser la massification des flux de conteneurs maritimes par le rail et la voie d’eau, et l’inextinguible dossier de la chatière, qui doit permettre aux barges fluviales d’accéder directement aux terminaux de Port 2000.

Stéphane Raison, le directeur général et président du directoire de Haropa Port, y voit, comme il l’avait souligné lors de l’annonce en début d’année, « un signal fort pour la place portuaire du Havre, confortée dans son positionnement en tant que porte d’entrée du nord-ouest de l’Europe » dans un modèle proche des ports de la rangée nord-européenne. En attendant, le port normand a largement profité de la désorganisation généralisée des escales en ce sens qu’il a servi de déroutage à ses rivaux nord-européens trop encombrés. Ses trafics en portent le témoignage en 2021 avec une croissance 29 % par rapport à 2020 pour s’établir à 3,07 MEVP.

Clarification du paysage portuaire français

Le paysage de la manutention dans les grands terminaux à conteneurs français s’est nettement clarifié ces dernières années. Avec le retrait de Perrigault, il ne reste plus beaucoup d’indépendants, excepté le groupe breton Kuhn qui a racheté les actitivés français de Bolloré (une quinzaine de ports). 

Les grandes compagnies de la ligne conteneurisée trustent le marché. Outre Le Havre, MSC est à Fos via sa filiale Seayard, dont il est actionnaire à 50 % aux côtés de APM Terminals (42 %) et Cosco (8%). En plus du Havre avec GMP, CMA CGM est également à Fos avec Eurofos, les deux étant des filiales de PortSynergy, dont est actionnaire Terminal Link et DP World à parité.

Récemment, DP World a annoncé quelques mouvements de capitaux. Terminal Link est devenu actionnaire majoritaire de GMP (50,2 %) tandis que Icon Infrastructure, un fonds d'investissement basé à Londres, a racheté les parts du DP World au Havre. CMA CGM est aussi à Dunkerque, seul à bord.

Enfin, MSC a raflé la mise sur le continent africain en rachetant toutes les activités portuaires de Bolloré pour une valeur d’entreprise de 5,7 Md€. Bolloré a ainsi tiré un grand trait sur tout un pan de son histoire sulfureuse et MSC est devenu un colosse en Afrique.

Adeline Descamps

*MSC est actionnaires aux côtés de US Global Infrastructure Partners (GIP) et Singapore Government Sovereign Wealth Fund (GIC).


 

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