Costa Croisières, filiale européenne du groupe Carnival avec les marques Costa et AIDA (flotte de 23 navires), formalise son intérêt pour le méthanol, dont on fait l’élixir de la soute de demain s’il est produit à partir de sources renouvelables ou de carbone capturé, en se rapprochant du producteur de méthanol Proman.
Basé en Suisse, avec des actifs aux États-Unis, à Trinidad et à Oman, Proman est identifié comme le leader mondial de la production de méthanol. L’entreprise est notamment associée à l’armateur suédois Stena Bulk au sein d’une coentreprise qui a commandé des navires avec le méthanol pour carburant maritime. Elle est aussi un des fournisseurs de Maersk pour sa future flotte de 19 porte-conteneurs avec le combustible alternatif.
Le troisième paquebot au GNL de Costa en escale inaugurale à Marseille
Souplesse opérationnelle
« Le méthanol élimine pratiquement tous les polluants atmosphériques tels que les particules et les oxydes de soufre. Il est facilement accessible et peut être produit de manière biosynthétique, avec des procédés à faible teneur en carbone, ou en utilisant de l'hydrogène, justifie Costa, qui en fait un carburant alternatif de premier plan pour atteindre les objectifs de réduction des gaz à effet de serre, « en raison de sa facilité à l’utiliser, tant à bord de nouvelles constructions que pour le réaménagement de navires existants ».
L’un des leaders du secteur de la croisière fait référence au fait que la matière première est déjà largement commercialisée, ce qui la rend plus accessible pour d’autres usages. « Toutes les formes de méthanol, qu'elles soient à base de gaz naturel, à faible teneur en carbone ou renouvelables, peuvent être mélangées, indépendamment des filières de production ».
Par ce protocole d’accord, Costa et Proman cherchent précisément à accélérer l'approvisionnement en méthanol durable mais aussi à ouvrir à la construction de nouveaux navires alimentés avec le combustible et au refit d’autres. « Grâce aux technologies et aux infrastructures existantes, il est d’ores et déjà possible de modifier un navire pour qu’il puisse utiliser du méthanol comme carburant », assure Tim Cornelius, directeur général du développement chez Proman.
Le méthanol en tant que carburant marin gagne en importance, certes en raison de sa capacité à être un carburant neutre en carbone, mais aussi car il est facile à manipuler et à stocker pour les membres d'équipage et sa combustion est fiable. Preuve de sa percée, 43 nouvelles constructions devraient utiliser ce carburant en 2023, selon l'Association chinoise de l'industrie nationale de la construction navale (CANSI). Pour autant, 81 % de tous les navires commandés avec des carburants alternatifs l'année dernière seront au GNL.
Neuf navires au GNL pour Carnival
Adepte de la propulsion au GNL, avec quatre navires en service, sa flotte dotée de l’alimentation électrique à quai, expérimentant en outre les biocarburants et les piles à combustible, Costa passe donc à l’étape d’après.
Pour mémoire, c’est en 2018 que l'AIDANova est devenu le premier paquebot en mesure de naviguer au GNL. Depuis, la marque allemande s’est dotée d’un deuxième, également construit chez Meyer Werft en Allemagne. Costa a confié les siens à Meyer Turku en Finlande. D'ici à la fin de l'année, Carnival disposera de neuf navires susceptibles de consommer du GNL.
Devancé par TUI et Norwegian ?
Mais le groupe ne sera pas le premier parmi les premiers sur le méthanol. En 2022, Meyer Turku a lancé la construction d’un paquebot prêt à être alimenté le cas échéant au nouveau carburant, pour lequel tout reste à faire pour un usage maritime. La compagnie allemande TUI Cruises devrait donc être la pionnière en la matière si son paquebot entre service comme prévu en 2024.
Norwegian Cruise, qui a fait l’impasse sur le GNL, a signé un protocole d'accord avec le motoriste allemand MAN, très investi par ailleurs sur les moteurs à l’ammoniac. La faisabilité de l'exploitation du méthanol pour les paquebots est au programme. Dans le cadre de ce contrat, MAN Energy Solutions modifiera un moteur MAN 48/60 à vitesse moyenne pour le rendre compatible avec un double carburant MGO/méthanol.
Disney Cruise Line a annoncé de son côté que le Global Dream que la compagnie a racheté à MV Werften, en faillite, sera converti pour fonctionner au méthanol. Il devrait entrer en service en 2025.
Adeline Descamps