Stabilité ? C'est ce que semblent indiquer les 8,8 Mt qu’a traités le port de La Rochelle et son infime baisse de 0,9 % par rapport à 2020. La réalité est toute autre, avec un début d'année laborieux et des flux en dents de scie. « On n'avait jamais connu pareille période de turbulences », assure même Michel Puyrazat, le président du directoire.
Les céréales, qui constituent la locomotive de l'activité du Grand port maritime, sont à l'avenant. Trop de pluies ou pas assez et c'est l'ensemble des trafics qui s'en ressentent. Les piètres moissons de 2020 avaient déjà fait reculer les volumes sur les derniers mois de l'année et ont encore fait des vagues sur les six premiers de 2021. Fin juin, le recul était de 18 % par rapport au même semestre de l'année précédente. La meilleure récolte de 2021 a permis de regonfler les flux sur la fin d'année et ainsi de limiter la baisse à 13 %. Au total, 3,2 Mt ont quitté les quais vers l'Afrique de l'Ouest et du Nord et l'Asie.
Retour au port de proximité
Belle prestation en revanche des produits du BTP et des produits forestiers. Les premiers, qui pèsent 1,1 Mt, ont été dopés par la reprise du secteur et affichent une progression de 23 %. Quant aux seconds, ils atteignent 572 000 t pour une hausse de 12,1 %. Deux raisons à cette croissance. Côté papier, la filière sort de quelques années de restructuration et la papeterie de Condat en Dordogne, importante cliente du port, a rouvert après 18 mois de fermeture.
Pour les autres produits forestiers, notamment les sciages, c'est la congestion portuaire si durement vécue ailleurs qui profite au port rochelais, un phénomène déjà manifeste au premier semestre. Las de devoir attendre que les conteneurs de bois soient enfin débarqués et acheminés, les importateurs, agacés par les surcoûts que généraient ces attentes, sont revenus au bon vieux conventionnel, plus fiable en ces temps tourmentés, surtout quand il est déchargé dans un port échappant à la congestion et dont les escales restent fluides et courtes. Des importateurs de l'hinterland ont ainsi délaissé les ports du nord et renoué avec celui de proximité.
À-coups
Dans les vracs agricoles, les trafics d'aliments pour animaux se sont concentrés sur la Bretagne, au détriment de La Rochelle. En retrait, ils s'établissent à 181 000 t, tandis que les engrais restent stables à 596 000 t.
La progression la plus marquée est celle des autres marchandises, en l'occurrence des pieux d'éoliennes pour le champ offshore de Saint-Nazaire. Le trafic de ces « autres » a presque doublé pour atteindre 289 000 t.
Les acteurs portuaires ont eux aussi connu des à-coups. Ça a été le cas d'AMLP, filiale de Maritime Kuhn, accusé par certains de ses clients de favoriser le trafic d'éoliennes à leur détriment. La réponse a été l'embauche de dockers supplémentaires par le manutentionnaire et l'achat par EVA, filiale de Maritime Kuhn et de Sica Atlantique, d'une grue Liebherr de 208 t de capacité, pour un investissement de 4 M€. Une deuxième grue est annoncée pour les tout prochains mois qui prendra place sur le môle d'escale.
Myriam Guillemaud Silenko