la CGT évoque un « scénario noir » alors que les installations d'ArcelorMittal ne tournent actuellement pas à pleine capacité à Dunkerque. Le sidérurgiste européen a décidé de retarder son projet d'acier décarboné sur le site nordique, a indiqué samedi le ministre délégué chargé de l'Industrie. « La sidérurgie européenne est actuellement en crise, avec un niveau de demande et de prix de l'acier atteignant un bas historique », a indiqué Marc Ferracci, dans une déclaration transmise à l'AFP.
Selon Eurofer, qui représente la filière au niveau européen, la production est tombée au niveau le plus bas, non viable, d'environ 60 % de la capacité des hauts fourneaux européens. Au niveau mondial, les surcapacités ont atteint 551 Mt en 2023, et 157 Mt de capacités supplémentaires devraient être installées d'ici 2026, a annoncé l'OCDE, principalement avec des technologies très émettrices de gaz à effet de serre.
D'après L'Usine Nouvelle, qui a révélé l'information, le groupe demande des mesures de protection de l'acier européen de la part de la Commission européenne avant d'engager tout investissement de ce type en Europe.
850 M€d d'aides
Le projet d'acier vert d'ArcelorMittal à Dunkerque, qui consiste à construire deux fours électriques et une unité de réduction directe du fer, première étape pour produire l'acier décarboné, est estimé à 1,8 Md€, comprenant une aide jusqu'à 850 M€. « L'État français travaille, notamment avec les autres pays européens, à rétablir des règles équitables face à la concurrence internationale », a précisé le représentant du gouvernement.
« Avec les engagements liés à la COP21, on doit réduire nos émissions de CO2 d'un tiers d'ici 2030. Si on ne tient pas ces engagements, dans le meilleur des cas, Arcelor supprime toute la filière fonte, qui représente la moitié de l'usine (...). Le scénario le plus pessimiste, qu'on redoute, c'est la fermeture de l'usine », alerte Gaëtan Lecocq, secrétaire général de la CGT à Arcelor Dunkerque et élu au CSE de Dunkerque. Arcelor Dunkerque est le plus haut fourneau d'Europe, entre 8 000 et 9 000 emplois directs et indirects en dépendent.
Alerte rouge
En octobre, sept grand patrons de la fédération européenne de l'acier Eurofer, dont les PDG de Tata Steel NH, Arcelor Mittal Europe et Salzgitter, avaient tiré la sonnette d'alarme à la veille d'un Conseil de l'Europe. « L'industrie de l'acier traverse sa pire crise depuis la crise économique et financière de 2009 alors que la surcapacité de production mondiale d'acier, la concurrence déloyale permise par l'Union européenne sur son sol et les prix élevés de l'énergie menacent les emplois et l'activité », faisaient-ils valoir
Inspirés par le récent rapport Draghi sur la compétitivité de l'Europe, les industriels réclament notamment des mesures contre les pratiques commerciales déloyales ; l'amélioration du mécanisme d'ajustement carbone aux frontières (CBAM en anglais) « afin d'empêcher le contournement, la réorientation des ressources et la délocalisation » ; une réduction des coûts de l'énergie pour leur secteur très consommateur et exposé à une importante concurrence mondiale et l'établissement de marchés pilotes pour stimuler la demande d'acier vert en Europe.
La production d'acier dans l'UE a diminué de 30 % depuis 2008 pour atteindre 126 Mt en 2023 et près de 100 000 emplois ont été perdus en 15 ans, indique la lettre ouverte.
La rédaction (avec l'AFP)