Le patrimoine de Bolloré dispersé entre CMA CGM et MSC

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Opération à impact entre groupes familiaux. Le groupe des Saadé et celui des Aponte se sont partagé deux gros morceaux du lourd patrimoine portuaire et logistique des Bolloré. Les héritiers de l'empire construit par Vincent Bolloré réalisent ainsi deux faramineux coups financiers en empochant près de 10 Md$.

Les armateurs investissent la logistique pour s’affranchir, jurent-ils, des cycles diaboliques du transport maritime et de la volatilité des taux de fret. En tant qu’intermédiaires, les commissionnaires n’en sont pas pour autant décorrélés, avec toutefois la capacité de répercuter en grande partie les variations de prix… à leurs clients.

En reprenant les activités de commission de transport de Bolloré, l’armateur français CMA CGM a rompu les dernières amarres qui rattachaient le groupe français créé par Vincent Bolloré à son riche passé dans le transport.

La compagnie marseillaise aura déboursé 4,65 Md€ pour ce bout de Bolloré, qui représentait, lors de l’acquisition à la fin de l’année 2022, 34 % du chiffre d’affaires du groupe familial (20,67 Md€ en 2022) et 578 M€ en matière de résultat opérationnel ajusté (Ebitda), mesure étalon dans la commission de transport.

L’activité convoitée par CMA CGM fait partie des 15 premières entreprises du secteur, avec 390 000 t traitées en aérien et 710 000 EVP en maritime. Avec cette acquisition, l’armateur marseillais fait un pas de géant dans sa stratégie visant à gérer les flux de bout en bout. Il met la main sur une toile mondiale maillée-serrée autour de grands hubs intercontinentaux aérien et maritime, avec un réseau de 358 agences dans 63 pays et près de 1 million de m2 d’entrepôts.

Avec cet apport, Ceva Logistics, l’ex-commissionnaire suisse que CMA CGM avait sauvé en 2018 de la convoitise du danois DSV, est de taille à se hisser parmi les cinq grands du secteur derrière DHL, Kuehne+Nagel, DSV et DB Schenker.

Le transporteur de ligne diversifie en outre son portefeuille sectoriel en faisant son entrée dans le fret de projet industriel (énergie, industrie minière, BTP et aéronautique), ce que Ceva couvre a priori moins. Ce qui n’est pas non plus sans intérêt pour la division breakbulk du groupe CMA CGM.

24 Md$ cumulés

Finalement, en peu de temps, le troisième acteur de la ligne régulière aura consolidé un pôle logistique puissant autour de sa filiale en l’étoffant par des opérations de croissance externe dans différents secteurs, à l’instar du retail (CLS Ingram), de la logistique des véhicules finis (Gefco) ou encore de la livraison du dernier kilomètre (Colis Privé).

La combinaison des activités logistiques du groupe représente un chiffre d’affaires global de près de 24 Md$ sur la base de leurs résultats en 2022 (les recettes de Maersk dans le même segment, qui partage une approche similaire, atteignaient 14 Md$ à période comparable). « C’est l’acquisition la plus importante depuis la création du groupe en 1978 », a reconnu Rodolphe Saadé au moment de l’acquisition de Bolloré Logistics.

Un chèque de 5,7 Md€

MSC, le groupe aux accents italiens mais aux activités domiciliées en Suisse, n’a pas hésité à faire un chèque de 5,7 Md€ à la famille Bolloré pour s’offrir l’empire portuaire africain du groupe français, qui s’étend du Gabon (Owendo International Port) au Cameroun (Douala, Kribi) en passant par la Guinée (Conakry), la Côte d’Ivoire (Abidjan) et le Sénégal (Dakar).

Quand MSC, qui n’était alors que le numéro deux du secteur, a fait parvenir sa proposition, Bolloré Africa Logistics était présent dans 42 ports en qualité d’opérateur de terminaux portuaires (16 terminaux à conteneurs en Afrique centrale et de l’Ouest, soit 4,83 MEVP; sept installations ro-ro et trois ferroviaires), d’agent de lignes maritimes et de manutentionnaire de marchandises non conteneurisées.

Déjà présent en Afrique, avec sa filiale Terminal Investment (TIL), l’armateur suisse contrôle la manutention portuaire de Lomé au Togo, dont il a fait son hub régional et qui a rapidement dépassé le million d’EVP, et de San Pedro en Côte d’Ivoire. Mais c’est presque de l’histoire ancienne.

Adeline Descamps

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