« La création des alliances constitue une nouvelle vague de la conteneurisation. Des changements vont intervenir à leur niveau, dont on ignore encore l’impact réel. Il faudra attendre quelques mois avant de pouvoir définir des orientations. En ce qui concerne Hamburg Süd, il y a eu ces trois dernières années une forte expansion avec l’intégration de CCNI, mais c’est une compagnie de taille moyenne. En outre, il devient évident que les opérateurs de niches n’ont plus un grand avenir dans l’industrie du shipping du futur. »
Hamburg Süd, spécialiste nord-sud, est devenu un méga carrier est-ouest – le seul secteur manquant est la relation Europe-Afrique de l’Ouest – notamment grâce à sa coopération avec UASC, membre de l’alliance O3. Cette dernière étant appelée à subir une importante mutation, quelle sera l’évolution pour l’armement allemand? Dans quelle alliance s’intégrer et avec qui? Faut-il commander des navires de 18/2 00 EVP?
Alliances et risques de surcapacité
Selon Philip Oetker, la situation est actuellement très confuse. Qui ira avec qui? Quant à l’acquisition d’ULCS de 20 000 EVP, tout dépend de l’alliance à laquelle on s’intègre et pour combien de temps. Pour l’instant, nous n’avons pas de réponse, dit Philip Oetker. Il rappelle que bien des erreurs ont été commises, qu’il y a eu pléthore de commandes de grands navires qu’il faut remplir, alors qu’il y a surcapacité et que les taux de fret restent excessivement bas. Phénomènes que l’on s’efforce de réduire en annulant des voyages, mesures à court terme, qui ne constituent pas la véritable solution. Les pertes sont considérables. Il faut des solutions structurelles.
L’avenir à court et moyen terme est toujours incertain. L’Inde connaît la croissance, mais manque d’infrastructures, la Chine est dans une phase de ralentissement, et l’Amérique du Sud (dont le Brésil) a des problèmes économiques. Les pronostics en matière de croissance du commerce mondial sont faibles. Quel sera l’impact des prochaines consolidations? Les alliances ont des avantages qui permettent d’éliminer des coûts, mais il y a le problème de l’ajustement de la capacité. De plus, il s’agit de la cohabitation de différentes mentalités. Ceci étant, tout le monde veut être prêt pour 2017, alors que l’incertitude subsiste. Pour Philip Oetker, qui classe Hamburg Süd dans la catégorie basse de la classe moyenne du Liner, il importe de bien réfléchir aux prochaines étapes.
Tout récemment, Klaus Michael Kuehne, le principal actionnaire de Hapag-Lloyd, a déclaré que son armement, malgré la reprise de CSAV, était encore trop petit, qu’il lui fallait croître via reprises ou fusions, qu’il devait jouer la carte des ULCS de 18 000 à 20 000 EVP. Faut-il s’attendre à un nouveau round de négociations avec Hamburg Süd? À ce sujet, Philip Oetker fait preuve de prudence, des fusions au niveau national ne sont pas nécessairement idéales. Les deux armements coopèrent d’ailleurs très bien dans divers trafics, mais les structures sont différentes. Lorsqu’il faut tenir compte de différents actionnaires, les décisions sont beaucoup plus difficiles à prendre.
Un groupe familial aux intérêts multiples
Au cours de ses 125 ans d’existence, cette vaste entreprise familiale allemande, a su s’imposer dans bien des secteurs industriels. Son chiffre d’affaires annuel de 11 Md€ est généré à 50 % par sa division transport maritime, soit 5,18 Md€, dont 40 % dans le secteur des lignes régulières sous le label Hamburg Süd. En tant qu’armement, l’entreprise aligne 168 navires, dont 56 trampers et 112 navires de ligne. Les trafics conteneurisés sont axés sur les relations Amérique du Sud, côtes Est et Ouest, Europe, Amérique du Nord, Asie et Australie. Sa flotte se distingue par la forte capacité en reefers. Ses nouvelles générations de porte-conteneurs de 10 600/9 500 EVP, 9 000 et 7 700 EVP ont des capacités reefer respectives de 2 100, 1 600 et 1 300 conteneurs. Le volume transporté en 2015 est de 3,4 MEVP.
En Europe du Nord, deux ports jouent un rôle prépondérant: Rotterdam à l’importation et Anvers (près de 320 000 EVP en 2015) à l’exportation. L’armement escale également au Havre.
En dehors du maritime, le groupe compte plusieurs divisions: produits alimentaires (2,62 Md€), bières et boissons non alcoolisées (1,92 Md€), vins pétillants et spiritueux (697 M€), autres: produits chimiques, hôtels de luxe et transport terrestre (500 M€). En dehors du chiffre d’affaires global, signalons aussi l’activité bancaire (Bankhaus Lampe et filiales), dont le bilan consolidé porte sur 2,77 Md€.