La réglementation actuelle en faveur de la protection de l'environnement évolue rapidement. Mise en place par l'Organisation maritime internationale (OMI), la convention Marpol a promu au rang de standard la double coque pour les pétroliers et se penche désormais sur une autre source de pollution, à savoir les soutes à carburant. La révision de l'annexe 1 de Marpol (qui entre en vigueur le 1er janvier 2007) comporte en effet une partie sur la protection des soutes à combustible pour tous les navires de commerce livrés à partir du 1er août 2010 et transportant plus de 600 m3 d'hydrocarbures. Concrètement, ces navires doivent notamment éloigner les capacités des murailles extérieures de manière à minimiser les risques de fuite en cas de collision ou d'échouement. Ce qui n'est pas sans conséquence si l'on en croit Gilles Longuève, directeur commercial de JLMD Ecologic Group: "Ces soutes double paroi posent le même problème que la double coque classique des pétroliers, à savoir l'accessibilité en cas d'urgence. La récupération du polluant est rendue bien plus difficile du fait de cette double paroi à traverser."
Le cas de l'Ece illustre bien ces propos. Ce chimiquier battant pavillon des Îles Marshall a sombré le 31 janvier dernier après une collision avec un vraquier maltais à 50 milles à l'ouest de Cherbourg. "Si la cargaison de 10 000 t d'acide phosphorique a été lâchée sous contrôle et a pu se diluer dans la mer sans risque conséquent pour l'environnement, il a en revanche été impossible d'accéder aux soutes à combustibles qui, situées sous le château et sous le pont, n'étaient pas directement accessibles", constate Gilles Longuève. Idem dans le cas du porte-conteneurs Rokia-Delmas, échoué au sud de l'île de Ré le 24 octobre dernier, où de gros moyens en hommes et matériels ont été nécessaires pendant plusieurs semaines pour atteindre et vider les soutes à combustibles. Et il est clair que la révision de l'annexe 1 de Marpol ne va pas faciliter ce genre d'opérations.
QUELLE SOLUTION?
Pour Gilles Longuève, la solution à ce problème est simple et déjà en service sur des navires du même type. "Il s'agit de préinstaller des connecteurs à bord qui, en cas d'incident, peuvent être facilement atteignables et donner un accès direct aux cuves que l'on souhaite vider." Pour parfaire l'opération, un outil de connexion rapide et adapté a été développé par la société de sauvetage Smit Salvage, histoire de rendre immédiates, fiables et sécurisées toutes les opérations de vidage. "Dans cette configuration l'Ece aurait pu être vidé à 90 % (réserve de principe) de son combustible et le littoral aurait ainsi été libéré de toute menace de catastrophe."
Ces nouvelles technologies FOR Systems(1) se répandent de plus en plus dans le domaine maritime. Visant dans un premier temps les navires citernes, les industriels du secteur comme la société française JLMD ont développé des versions pouvant être adaptées sur des vraquiers ou des porte-conteneurs. "La gestion de nombreux accidents catastrophiques pour l'environnement aurait pu être différemment conduite si les navires en cause avaient été équipés de ces solutions permanentes de pompage d'urgence", conclut Gilles Longuève. Tout en soulignant que "les collectivités locales seraient moins inquiètes d'accueillir des navires en difficulté si elles avaient l'assurance qu'une solution de crise, déjà installée à bord, permettait de désamorcer le drame en évacuant rapidement les polluants du navire".
(1) Fast Oil Recovery Systems (systèmes de récupération rapide des polluants).