Les quatre conventions à Lyon, Salaise-Sablons, Portes-lès-Valence et Arles détenues par la Compagnie Nationale du Rhône (CNR) jusqu’en 2041, arrivent à échéance fin 2024. La procédure entamée par la CNR, qui a choisi de mettre les concessions sur le marché, touche donc à sa fin. Des quatre, c'est évidemment celle du terminal à conteneurs Édouard Herriot à Lyon qui a capté toutes les attentions ces derniers mois.
La société Lyon Terminal, qui a pour actionnaires le Grand port maritime de Marseille, la CNR et Sogestran, actuel gestionnaire du terminal à conteneurs de Lyon, n’a pas déposé de dossier de candidature. « Nous avons décidé d'ouvrir à ceux qui font le marché à l’instar de ce qui se fait ailleurs et de mettre au diapason l’axe Lyon-Marseille au même niveau que les hinterland », expliquait en octobre au JMM Laurence Borie Bancel, présidente du directoire de la CNR et vice-présidente du Conseil de surveillance du port de Marseille-Fos. « Cette remise en concurrence vise à développer l’activité, la massification fluviale et ferroviaire. Ces objectifs figurent dans les cahiers des charges avec l’ambition de décarboner le terminal Edouard Herriot », ajoutait-elle.
CMA CGM aux manettes
La candidature de CMA CGM n'est pas étrangère à la focalisation des intérêts sur Lyon. Le transporteur est la tête de pont (67 %) d'une offre portée par un consortium avec la Banque des Territoires (23 % ), les CCI de Lyon Métropole Saint-Étienne Roanne ( 4 % ) et celle d'Aix-Marseille-Provence ( 4% ). Le groupement vient d'être désigné par la CNR pour opérer et développer la sous-concession pour une durée de 30 ans. La stratégie des grands armateurs pour la logistique à terre et la maîtrise des pré- et post-acheminements en vue de garantir un transport sans couture est désormais connue. C'est celle du groupe français de transport et logistique mais elle est aussi celle du Danois Maersk.
Le pool promet d'investir à Lyon de l'ordre de 40 M€ pour « développer les trafics fluviaux et ferroviaires sur l’Axe Méditerranée Rhône Saône, via les installations portuaires du port de Marseille, par la modernisation et l'extension de l’infrastructure existante, la création de nouvelles voies ferrées, l'électrification des équipements de manutention », indique le consortium. Alors que 70 000 conteneurs par an empruntent actuellement le fleuve entre Marseille Fos et Lyon, il est prévu un trafic de 230 000 EVP d'ici 2028. À ce stade, les barges sont majoritairement chargées de vrac (sable, matériaux, céréales).
« L'arrivée de CMA CGM va attirer des marchandises », a réagi Romain Maillot, délégué général au développement de l'axe MeRS (Méditerranée-Rhône-Saône) auprès de l'AFP. « L'armateur ne fait pas seulement de la manutention. Il peut s'occuper du transport des marchandises depuis leur point de départ jusqu'au point d'arrivée ». Comprendre en sous-texte : supprimer de nombreux intermédiaires.
S'inscrire dans la logique d'un grand port
Au-delà, il s'agira pour le fleuron du transport maritime national, bien en cour auprès de l'exécutif, de s'inscrire dans la logique d'un grand port courant sur 330 km navigables entre Marseille-Lyon. Un projet présenté il y a deux ans par Emmanuel Macron afin de mieux connecter par voie fluviale la cité phocéenne à son arrière-pays et d'irriguer ainsi les marchés européens. Le chantier est en lente gestation. Sur l'axe Méditerranée Rhône-Saône (MeRS), 80 % des marchandises sont aujourd'hui acheminées par la route, 15 % par le rail et 5 % par le Rhône.
Selon Romain Maillot, les volumes transportés sur l'eau pourraient être quadruplés sans investissement supplémentaire, car l'axe Lyon-Marseille « est bien équipé avec 17 zones portuaires, un chenal, des écluses et de nombreux entrepôts ».
Complémentarité compliquée
La problématique de la dorsale Rhône-Saône est ailleurs : il faut compter deux à trois jours sur le fleuve en raison des nombreux barrages situés au niveau des centrales hydroélectriques, contre trois à quatre heures en camion. Depuis Marseille, les marchandises remontent au plus haut sur le fleuve jusqu'à Chalon-sur-Saône (Bourgogne-Franche-Comté) et ont encore de la distance à parcourir jusqu'à destination. Le prix de la manutention reste l'alpha et l'oméga pour aider à basculer. À isocoût, il restera toujours plus lent donc moins intéressant. Tout l'enjeu est donc de trouver la complémentarité entre la barge, le rail et la route, dont la concurrence dessert tout développement.
Adeline Descamps
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