Avant de parler, de l’adolescence de Djo, un des deux héros de cette BD, racontez-nous la naissance de l'œuvre. Comment l’idée a-t-elle germé ?
Geoffrey Delinte : Nous avons réalisé une BD, « La grande métamorphose de Théo ». Nous en étions à la fin du projet, et nous avions envie de continuer à travailler ensemble. J’avais entammé un projet autobiographique, dans un petit carnet, autour du milieu des routiers, mon père faisant ce métier. Je n’avais pas les armes pour porter ce projet seul, j’ai proposé à Marzena qui a accepté.
Marzena Sowa : Je me suis plongée dans l’enfance de Geoffrey ainsi que dans la vie des routiers afin de connaître leur quotidien. Le père de Geoffrey partait à la semaine. Une vie un peu comme en escargot avec sa maison non pas sur le dos, mais dans la cabine du camion.
Je devais construire ce lien père-fils, rester également entre fiction et réalité pour être crédible. Je me suis inspirée du vécu de Geoffrey et son père pour créer les personnages en les plaçant dans des lieux réels.
Le père de Geoffrey m’a beaucoup aidée et en répondant à mes nombreuses interrogations. Petite, je rêvais de conduire un poids lourd, je trouvais que c'était passionnant de voyager, de voir toujours quelque chose de nouveau. Nous ne rencontrons jamais les mêmes personnes, tout change, c’est un peu une métaphore de la vie.
Présentez-nous le récit...
Marzena Sowa : C’est l’histoire de Djo, 13 ans, qui part sur dans le camion avec son père pendant les vacances scolaires. Sur la route, il part aussi à la découverte de son père. Finalement, ils ne se connaissent pas beaucoup, c’est un papa de dimanche, ils se voient de temps en temps.
Le livre, c’est aussi une quête d’identité, au gré des rencontres, des gens que Djo croise sur la route. Il se forge des opinions, des points de vue. Il crée son identité.
Vous écrivez que dessiner, c’est voyager sans bouger, que voulez-vous dire ?
Geoffrey Delinte : Enfant, j’adorais partir avec mon père sur les routes, nous étions seuls dans le camion, on créait notre propre voyage… Je dessinais beaucoup de voitures et de camions. C’est représentatif du travail de l’illustrateur qui a des similitudes avec le conducteur routier. Dans le dessin, nous travaillons seul et avons aussi des commandes…
Marzena Sowa : Il existe la même solitude entre l'auteur et le conducteur. Nous passons beaucoup de temps seul.
Parallèlement à cette relation père-fils, vous évoquez l’économie, l’écologie, les migrants... Souhaitez-vous faire passer des messages ?
Marzena Sowa : Ce n’était pas mon but, je voulais juste raconter une histoire dans laquelle chacun pioche ce dont il a envie. Si nous retrouvons ces sujets dans le livre, c’est peut-être ma sensibilité et aussi l’univers des routiers. C’était donc naturel d’en parler.
Vous avez cependant souhaité redonner de la visibilité aux routiers à travers cet ouvrage ?
Marzena Sowa : J'ai écrit ce livre pendant les confinements, et durant cette période sans leur travail cela aurait été beaucoup plus dur à vivre. Leur activité est primordiale, encore aujourd’hui, alors qu’ils sont souvent mal considérés. Nous souhaitions donc les mettre en lumière.
Bande dessinée : « Hey Djo ! », scénario de Marzena Sowa, illustration de Geoffrey Delinte ; éditions Gallimard BD ; ouvrage imprimé : 24,90 € ; version numérique : 17,99 €.
Une autre idée de lecture : « L’épopée d’un camionneur », un livre sur le chemin du pardon.