INTERVIEW. Benoît Hamon veut "faire de la plate-forme logistique France une référence mondiale"

Benoît Hamon, candidat PS à la Présidentielle 2017, insiste sur la nécessaire articulation du rôle de l'État et des régions dans le développement de l'attractivité logistique de la France.

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Logistiques Magazine a interrogé les candidats à la Présidentielle 2017 sur leur vision du secteur. Retrouvez notre entretien avec Benoît Hamon, candidat PS, après les interviews de François Fillon, candidat LR et de Marine Le Pen, candidate FN, publiées dans le numéro de mars. Également sollicités, Jean-Luc Mélenchon, de La France Insoumise et Emmanuel Macron, d'En Marche, n'ont pas encore répondu.

Logistiques Magazine : Selon une étude de la Banque Mondiale, l’indice de performance logistique de la France est passé du 13e rang en 2014 au 16e en 2016. Le coût de cette sous-performance a été estimé entre 20 et 60 milliards d’euros. Quels chantiers pourraient être engagés pour remonter dans ce classement ?

Benoît Hamon : Le secteur de la logistique contribue à hauteur de 10% du PIB français, génère environ 1,8 million d’emplois et un chiffre d’affaire de 200 milliards d’euros. Au-delà des chiffres, c’est avant tout un secteur au cœur de notre modèle productif, qui structure la gestion des flux sur tout notre territoire. Pour améliorer la performance de ce secteur hautement stratégique, les pouvoirs publics doivent être en mesure d’agir sur plusieurs domaines, allant de la planification à la recherche, en passant par le développement des plates-formes intermodales, la formation, la modernisation des infrastructures, le développement des nouvelles technologies de l’information, etc.

Dans cette perspective, la mise en place de la Conférence nationale de la logistique reflète la prise de conscience des pouvoirs publics pour développer une véritable stratégie en faveur de la logistique. Elle ne doit pas rester un événement sans lendemain. D’autres pays européens comme l’Allemagne, la Grèce ou l’Italie ont adopté des stratégies nationales pour organiser le développement du secteur de la logistique. Aussi, l’État devra-t-il s’engager pleinement dans la mise en œuvre de la stratégie nationale "France Logistique 2025" avec l’objectif de faire de la plate-forme logistique France une référence mondiale.


Logistiques Magazine : Comment l'État peut-il agir pour atteindre cet objectif ?

B. H. : En France, l’adoption d’un schéma directeur national pour la logistique permettrait de mieux valoriser le secteur de la logistique et d’adopter des objectifs stratégiques sur le long terme. Les Contrats de Plan État-Région devront également décliner les objectifs de ce schéma national. Car c’est aussi au plan régional et au niveau des métropoles (et de leurs grands pôles logistiques) que doivent être mises en œuvre des politiques ambitieuses concernant tant la localisation et la régénération des zones logistiques, que l’incitation au report modal et à la mutualisation des transports dits du dernier kilomètre : réglementations harmonisées, établissements logistiques urbains, stations de chargement au GNV, navettes ferroviaires ou fluviales.

Enfin, pour mieux intégrer les réseaux de fret intérieurs avec les grandes façades maritimes et les points d’entrée et de sortie, dans une logique de structuration de l’offre logistique, les propositions qui ressortent de l'étude "Stratégie portuaire et défis logistiques : quels leviers pour des dynamiques de long terme ?" portent des solutions ambitieuses. Le renforcement de la coopération entre les ports de France, en favorisant un regroupement par axes et façades, est souhaitable afin de faire face à la concurrence des autres grands ports européens et améliorer la performance du secteur logistique français. Ce renforcement de la coopération entre les ports devra se faire en lien avec le renforcement de l’engagement des collectivités territoriales et de l’État (moyen budgétaire, politique de fret régional, schéma directeurs...) pour mieux connecter les ports avec les hinterlands.

En matière de R&D, il est nécessaire de développer des programmes pluridisciplinaires, s’adressant à l’ensemble du secteur, agissant sur l’ensemble de la chaîne des acteurs, sur des grands thèmes comme la logistique, ou encore les transports de personnes en zone urbaine. La logique du Programme d'investissements d'avenir doit évoluer vers une approche plus holistique, comme l’était le PREDIT à une époque.


L. M. : Aujourd’hui, les bâtiments de stockage et de logistique ne disposent pas d’un régime fiscal clair. Ce qui les fait de plus en plus souvent basculer dans la catégorie des bâtiments industriels, avec des hausses de taxes foncières parfois très importantes. Est-ce que vous allez clarifier ce statut ?

B. H. : Le régime fiscal des bâtiments de stockage et de logistique est en effet peu clair. Depuis longtemps les professionnels demandent une clarification et des amendements aux projets de Loi de Finance ont été discutés et parfois adoptés en commission. Je souhaite clarifier le statut juridique des immobilisations industrielles. Compte tenu de la nécessité de sortir les professionnels du flou et celle de garantir l'intégrité de l'impôt qui nécessite de discerner les activités entre elles, je m'engage à organiser une concertation transparente bipartite entre les professionnels et leurs représentants, et l'administration.
 

L. M. : Quelles réflexions sur le transport durable ? Quelle organisation des flux de marchandises au sein des villes ?

B. H. : Avant tout, dans un contexte de décentralisation, il faudrait aussi penser l’évolution du secteur logistique à l’échelle régionale au sein de laquelle s’intègre la logistique urbaine. Les régions, qui bénéficient du transfert de la compétence transport des départements, devront assumer pleinement leur rôle de chef de file dans la définition des politiques de mobilité, notamment pour développer une véritable offre multimodale au niveau du territoire : planification régionale de l’intermodalité et planification régionale des infrastructures de transport dans le cadre de l’élaboration des SRADDET (*), coordination des pôles d’échanges, des systèmes d’information multimodaux, liberté tarifaire…

Dans ce nouveau cadre, les régions doivent également s’investir sur le fonctionnement logistique de leur territoire et du fret ferroviaire avec la desserte des sites industriels sur leur territoire. Il faut redonner sa place à la logistique dans les documents d’orientation publique. Au niveau des territoires il faudra ainsi généraliser les volets "logistique et transport de marchandises" dans les schémas régionaux d’aménagement prévu par la loi NOTRe.

Les nouvelles technologies de l’information, le développement du transport de marchandises collaboratif, la mutualisation et la collaboration entre professionnels, la reconversion de friches industrielles et/ou de parcs de stationnement peu utilisés en sites logistiques ou encore le développement de l’infrastructure de carburants alternatifs, sont autant de pistes qui peuvent être développées pour promouvoir une logistique urbaine durable.
 

L. M. : L’industrie a besoin d’infrastructures logistiques pour opérer. La mesure de sur-amortisement concernant les investissements de matériel productif a été prolongée jusqu’au 14 avril 2017. Cette mesure concerne également les matériels de manutention. Quelle suite prévoyez-vous à ce type de dispositif ?

B. H. : La question du sur-amortissement devra faire l'objet d'un dialogue approfondi avec les parties prenantes, car j ai bien conscience que le capital productif des entreprises françaises est encore trop âgé, trop peu renouvelé, ce qui pèse sur sa productivité.

(*) Schéma régional d'aménagement et de développement du territoire

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