Conjuguer camions frigorifiques et mode électrique n’est pas une aberration et ces véhicules ont dès à présent la possibilité d’être rentables pour de petites tournées. C’est le constat dressé par une étude baptisée "Camions électriques, il est temps d’embrayer sur la logistique urbaine" et pilotée par le cabinet de conseil Carbone 4 et coordonnée par l’ONG Transport & Environnement, en s’appuyant sur des cas de tournées réelles opérées par les transporteurs de produits frais Delanchy et Stef dans la Métropole du Grand Lyon.
Des tournées courtes en centre-ville
Il en ressort que 20 à 40 % des camions dédiés à la logistique du froid régionale pourraient être électriques et ceci dès 2023, avec "un faible besoin d’adaptation des schémas logistiques et sans besoin de recharge rapide, en prenant en compte une autonomie de 180 à 250 km", ce qui peut correspondre à des tournées courtes réalisées en centre-ville.
L’étude s’est appuyé sur deux des rares modèles de camions déjà commercialisés, ou en passe de l’être, à savoir le Renault Trucks E-Tech D, un porteur 4x2 électrique avec un PTAC de 16 t (batterie de 260 kWh) et disposant d’une autonomie de 175 km et le modèle gamme lourde E-Tech T en version porteur 4x2 électrique, avec un PTAC de 44 t (batterie de 260 kWh), qui sera disponible en 2023 avec une autonomie de 250 km maximum.
Un coût d’achat 2 à 3 fois plus cher
En termes de coûts totaux d’utilisation ( TCO), les auteurs indiquent que le TCO d’un camion électrique (sur 8 ans, la durée de vie de sa batterie) est inférieure à celui de son équivalent diesel pour un usage urbain, en considérant une tournée par jour de 200 km avec une charge lente au dépôt. Soit 287 000 euros contre 322 000 euros sur 8 ans.
Ce calcul tient compte bien évidement du dispositif de suramortissement ainsi que du bonus écologique pour le camion électrique, de manière à compenser un coût d’achat 2 à 3 fois plus cher, sachant que le coût de l’énergie et de l’entretien est moindre.
L'impact d'une charge rapide
Pour élargir le champ d’application des véhicules électriques, il faudra encore patienter jusqu’à 2024-2025, avec l’introduction de véhicules capables de tenir 400 à 500 km sur une seule charge. En attendant, les auteurs de l’étude ont calculé l’impact d’une recharge rapide de 30 minutes effectuée à mi-journée au dépôt en considérant deux tournées par jour de 200 km & 150 km. Notons que l’installation d’une borne de recharge rapide pour poids lourds, sans compter le raccordement, est estimé entre 34 et 70 000 euros.
De plus les recharges rapides peuvent accélérer le vieillissement des batteries, qui ne dureront certainement pas les 8 ans de garantie et devront être changées plus rapidement. En intégrant ces surcoûts, les auteurs tablent sur un TCO d’un véhicule électrique supérieur à 23 % à celui d’un camion diesel, hors aides (à l’acquisition et suramortissement).
Un TCO équivalent
La prise en compte des aides permet cependant d’arriver à un TCO équivalent, pointent les auteurs, qui sont persuadés que le passage à l’électrique doit s’effectuer dès à présent "afin d’éviter une demande en camions électriques trop brutale en 2030, à la fois en termes de financement pour les transporteurs et de production pour les constructeurs". Le cabinet recommande également de réserver l’accès aux ZFE aux seuls véhicules électriques pour les rendre plus compétitifs face aux solutions gaz et B100.